Le Parc naturel régional du Morvan bénéficie d'un contrat LIFE+ pour la restauration écologique du Cousin Aval. Sur la période 2011-2015, le contrat est de 3,2 millions d'euros. Soit une somme considérable, et une somme prélevée sur l'argent public.
Comme notre association l'a montré dans ses précédentes publications (voir ci-dessous), les seuils des moulins du Cousin représentent une altération modeste des écoulements, et rien ne démontre à ce jour qu'ils sont les principaux responsables de la raréfaction des truites et des moules perlières. Ces deux espèces étaient présentes dans la rivière au XIXe siècle, alors même que tous les moulins étaient déjà en place depuis 150 à 400 ans. Il est reconnu que les seuils du Cousin Aval ont des hauteurs modestes et un impact proportionné. On est très loin des grands ouvrages hydrauliques et infranchissables.
Un faible impact écologique, une vraie valeur patrimoniale et touristique,
un potentiel énergétique
Ces moulins, s'ils ne représentent pas une grave atteinte à l'écologie et la morphologie du Cousin, sont en revanche partie intégrante du paysage de la vallée et du patrimoine historique de l'Avallonnais. Ils représentent par ailleurs un certain potentiel énergétique, à l'heure où le Ministère de l'Ecologie a décidé d'appuyer sur l'accélérateur en ce domaine et de créer des "emplois verts".
Le Parc du Morvan a demandé au bureau d'études BIOTEC de proposer une stratégie de restauration. Dans 9 cas sur 24, le bureau d'études a proposé des solutions alternatives : soit la destruction complète du seuil de moulin, soit son aménagement par une passes à poissons (ou une rivière de contournement). Il va de soi que, compte-tenu du fort intérêt patrimonial et énergétique des moulins, notre association préfère le choix de l'aménagement non destructif, qui a pour vertu d'améliorer la circulation des truites, espèce hôte des larves de moules perlières.
Mais ce choix est-il économique ?
Comme le montre l'estimation de BIOTEC dans le tableau ci-dessus (travaux seuls, hors coût de dossier, avec chois de la solution la plus ambitieuse dans chaque cas), la destruction des 9 seuils para arasement ou dérasement représente un coût de 845 k€ alors que leur aménagement écologique représente un coût de 410 k€. Autrement dit la destruction, qui a de nombreux désavantages, est aussi l'option la plus dépensière: deux fois plus coûteuse.
Pourquoi pousser à la destruction du patrimoine hydraulique?
On doit donc sans regret favoriser les solutions de franchissement piscicole, et profiter des économies ainsi réalisées pour améliorer d'autres aspects de la morphologie et de l'écologie de la rivière. Et pour aider les collectivités à lutter contre la pollution chimique du Cousin et de ses affluents.
Hélas, plusieurs adhérents et riverains nous ont prévenu que le Parc du Morvan refuse dans certains cas le financement des passes à poissons, préférant le choix le plus destructeur (ou abandonnant le maître d'ouvrage à ses problèmes, sans lui faire bénéficier du financement très généraux de LIFE+ et sans améliorer du même coup l'état écologique du site).
Notre association aura l'occasion de revenir sur ce problème manifeste de gouvernance, auprès des médias et dans une réunion d'information en septembre. Nous verrons dans un prochain article la question du potentiel énergétique des 24 sites, question qui a malheureusement été totalement délaissée.
Autres études sur le Cousin
Les moulins du Cousin et les truites
Les moulins et les moules perlières
31/08/2014
29/08/2014
Transition énergétique: le message de Ségolène Royal aux agents de l'Etat
A l'occasion du séminaire de travail de Madame la ministre de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, avec les directrices et directeurs départementaux et régionaux du ministère (DDT, DREAL) et les directrices et directeurs de l’Agence de l’Environnement et de l’Energie (Ademe), Ségolène Royal a tenu les propos suivants :
Avec tous les acteurs de la petite hydro, nous aurons à coeur de rappeler dans les prochains mois ces engagements. Car pour le moment, moulins et usines hydrauliques doivent affronter la réalité suivante :
On jugera donc la nouvelle orientation du Ministère de l'Ecologie aux actes sur le terrain, plutôt qu'aux paroles en séminaires...
1) la mutation énergétique n’est pas une contrainte à subir mais une chance à saisir et la clef de ce que, pour le dire vite, j’appellerai une vraie sortie de crise. Il faut donc, de toutes nos forces, accélérer le mouvement pour obtenir des résultats;
2) il faut un cadre clair à l’action conjointe des citoyens, des entreprises, des collectivités et de l’Etat et en finir avec les usines à gaz procédurales, fussent-elles inspirées par les meilleures intentions : clarifier n’est pas alourdir les pressions réglementaires, fiscales et autres qui dissuadent d’agir alors que, dans l’action publique, c’est le pouvoir d’impulsion qui doit l’emporter, au service de la protection de l’environnement et des personnes;
3) d’où l’importance de mettre en place des outils concrets et des aides incitatives accessibles à tous, qui permettent à chacun de s’impliquer et d’y trouver un bénéfice.
4) Simplifier, innover et faciliter pour entraîner : tels sont, à mes yeux, les maîtres-mots de la démarche à mettre en œuvre avec le renfort de la loi, avec l’appui du Ministère et grâce à votre implication dans tous les territoires.
Avec tous les acteurs de la petite hydro, nous aurons à coeur de rappeler dans les prochains mois ces engagements. Car pour le moment, moulins et usines hydrauliques doivent affronter la réalité suivante :
- remise en cause des droits d'eau et règlements d'eau qui fondent légalement l'usage de l'énergie hydraulique;
- découragement fréquent à équiper les sites;
- contrôles environnementaux systématiques et répétés (quand les gros pollueurs sont bien moins contrôlés);
- menace de destruction des seuils et barrages sans lesquels il n'y a aucune puissance hydraulique;
- financement totalement injuste en faveur de l'effacement des ouvrages;
- exigences disproportionnées de franchissement piscicole qui plombe la rentabilité des projets ;
- complexité des dossiers IOTA "loi sur l'eau", multiplicité des interlocuteurs sur un même projet;
- opacité du contrôle règlementaire par l'Onema et les DDT-M.
On jugera donc la nouvelle orientation du Ministère de l'Ecologie aux actes sur le terrain, plutôt qu'aux paroles en séminaires...
28/08/2014
Un guide Onema 2014 sur la franchissabilité des obstacles par les poissons
L'Onema vient de publier dans sa collection "Comprendre pour agir" un guide complet sur l'évaluation du franchissement des obstacles à l'écoulement par les différentes espèces de poissons. Le guide a été conçu selon le protocole ICE (information sur la continuité écologique) partagé par les administrations, les acteurs de l'environnement, de l'eau et du territoire, les bureaux d'études, les chercheurs, ingénieurs et techniciens. Au sommaire de cet ouvrage de 200 pages : rappel sur la continuité écologique et l'ichtyofaune, énoncé des principes généraux du protocole ICE, diagnostic de la franchissabilité à la montaison, prédiagnostic pour les obstacles équipés de dispositifs de franchissement piscicole (passes à poissons de divers types).
La lecture de ce guide est très conseillée pour tous les maîtres d'ouvrages dont la rivière a été classée en liste 2 et qui ont une obligation d'aménagement à terme. En particulier, pour des rivières comme l'Armançon dont le principal enjeu migrateur de montaison est l'anguille adulte, on peut estimer que nombre de seuils présentent déjà des voies de reptation depuis l'aval, dont la pente et la rugosité sont à examiner de près selon les critères indiqués dans le guide.
Référence : Onema, Baudouin JM et al (2014), Evaluer le franchissement des obstacles par les poissons. Principes et méthodes, 202 p. (Si le téléchargement est long, essayez cet autre lien direct sur le site Onema).
La lecture de ce guide est très conseillée pour tous les maîtres d'ouvrages dont la rivière a été classée en liste 2 et qui ont une obligation d'aménagement à terme. En particulier, pour des rivières comme l'Armançon dont le principal enjeu migrateur de montaison est l'anguille adulte, on peut estimer que nombre de seuils présentent déjà des voies de reptation depuis l'aval, dont la pente et la rugosité sont à examiner de près selon les critères indiqués dans le guide.
Référence : Onema, Baudouin JM et al (2014), Evaluer le franchissement des obstacles par les poissons. Principes et méthodes, 202 p. (Si le téléchargement est long, essayez cet autre lien direct sur le site Onema).
01/08/2014
Aménagement de la vallée du Cousin: les moules souffrent-elles des moulins?
Après un premier travail consacré à la truite fario, la deuxième étude de notre association sur le Cousin aval est dédié à la moule perlière. En voici les principales conclusions. Elles ne justifient en rien la pression actuelle des animateurs du Parc naturel régional du Morvan (et des autorités en charge de l'eau) pour détruire les seuils de la rivière, effaçant l'histoire, le paysage et le potentiel énergétique de la vallée avallonnaise sans gain important pour l'environnement. Nous reviendrons prochainement sur les graves problèmes de gouvernance dans l'action du PNR Morvan.
• Jadis présente en grande quantité dans les bassins à socle cristallin des rivières françaises et européennes, la moule perlière a été progressivement décimée par des pêches surabondantes, des modifications des écoulements et des berges, et surtout par des pollutions chimiques diffuses ou concentrées, pollutions auxquelles l’espèce est très sensible.
• Les populations de moules perlières du Cousin sont attestées par des observations au XIXe siècle, mais leur signalement est alors noté comme récent et leur population paraît déjà peu nombreuse. On ignore l’évolution démographique locale de cette population.
• Les moulins, leurs retenues et leurs biefs ne constituent pas des milieux particulièrement hostiles à l’implantation de populations de moules perlières. Le ralentissement de l’écoulement peut avoir un rôle bénéfique dans certaines circonstances.
• L’arasement des seuils de moulins du Cousin devrait être sans effet notable sur les populations de moules perlières dans la zone Natura 2000, car les facteurs dégradants ne sont pas liés au premier chef à la continuité longitudinale. Les études menées depuis une dizaine d’années suggèrent que les recalibrages du lit et les modifications de berges sont les premières causes d’évolution négative des populations.
• Les pollutions d’origine agricole et domestique ont également eu un impact négatif. La charge en phosphore et phosphates est aujourd’hui localement supérieure à la tolérance des moules perlières en certaines zone du linéaire.
• Enfin, le taux d’étagement de la zone du Cousin étudiée par le programme LIFE+ / PNR Morvan est de 21,6% (25,6 m de hauteur aménagée sur 118,4 m de dénivelé total), qui signifie globalement un faible impact.
Référence
Hydrauxois-OCE (2014), Les moules perlières du Cousin Aval ont-elles disparu à cause des moulins et ont-elles la capacité de recoloniser la rivière ?, Restauration hydro-écologique de la Vallée du Cousin Aval, étude n°2, 13 p.