La Convention relative aux zones humides d'importance internationale particulièrement comme habitats des oiseaux d'eau est un traité international adopté le 2 février 1971 et plus connu sous le nom de Convention de Ramsar. Elle est entrée en vigueur le 21 décembre 1975. La France a signé la convention en 1971 et l'a ratifiée en 1986.
La convention de Ramsar donne une définition large des zones humides dans son article premier :
« étendues de marais, de fagnes, de tourbières ou d’eaux naturelles ou artificielles, permanentes ou temporaires, où l’eau est stagnante ou courante, douce, saumâtre ou salée, y compris des étendues d’eau marine dont la profondeur à marée basse n’excède pas six mètres »Dans les critères de reconnaissance des zones humides, Ramsar consacre une section particulière aux "zones humides artificielles", qui sont ainsi énumérées :
1 Étangs d’aquaculture (par ex. poissons, crevettes).La Convention rappelle ainsi une évidence reconnue par les experts et chercheurs en histoire de l'environnement : de nombreuses zones humides sont issues de la reconfiguration des bassins versants par les activités humaines au cours des derniers millénaires (voir Derex 2017 pour une introduction grand public). Dans les zones densément et anciennement peuplées comme l'Europe, les formes fluviales actuelles n'ont rien de spontané dans la majorité des cas. Des dizaines de milliers d'étangs français sont par exemple issus de l'ancienne gestion piscicole et maraîchère. L'origine "naturelle" ou "artificielle" d'une zone humide est donc un faux débat : ces milieux suscitent l'intérêt pour des fonctionnalités physiques et biologiques, ainsi que pour la diversité d'habitats qu'elles offrent et, basiquement, pour la disponibilité d'un milieu aquatique ou semi-aquatique plutôt que sec.
2 Étangs; y compris étangs agricoles, étangs pour le bétail, petits réservoirs; (généralement moins de 8 hectares ).
3 Terres irriguées; y compris canaux d’irrigation et rizières.
4 Terres agricoles saisonnièrement inondées.
5 Sites d’exploitation du sel; marais salants, salines, etc.
6 Zones de stockage de l’eau; réservoirs/ barrages/retenues de barrages/retenues d’eau; ( généralement plus de 8 hectares ).
7 Excavations; gravières/ballastières/glaisières ; sablières, puits de mine.
8 Sites de traitement des eaux usées; y compris champs d’épandage, étangs de sédimentation, bassins d’oxydation, etc.
9 Canaux et fossés de drainage, rigoles.
ZK(c) Systèmes karstiques et autres systèmes hydrologiques souterrains, artificiels
En droit français, les zones humides sont protégées par le Code de l'environnement. L'article L 211-1 CE les définit comme d'intérêt général dans le cadre de la gestion durable et équilibrée de l'eau :
1° La prévention des inondations et la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ; on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'annéeOn observe que cette définition très générale (terrain inondé d'eau douce) recouvre aussi bien des milieux naturels qu'artificiels, dont ceux spécifiés par Ramsar.
Le problème posé par la continuité écologique "à la française"
La réforme française de continuité écologique, inscrite dans la loi sur l'eau et les milieux aquatiques de 2006, a demandé de favoriser le transit sédimentaire et, surtout, la circulation des poissons migrateurs sur les rivières. A cette fin, plus de 20.000 ouvrages ont été classés en vue de les aménager (rivières classées en liste 2 au titre de l'article L 214-17 CE). Il s'agit pour la France d'une loi inscrite dans la continuation d'anciennes demandes halieutiques et non dans une réflexion propre au début du XXIe siècle (voir cet article sur le genèse des lois de continuité). Le problème est qu'une mesure favorable à certaines espèces de poissons ne l'est pas forcément pour le vivant en toute généralité (les poissons ne représentent que 2% des animaux aquatiques).
L'expérience révèle que sur plusieurs bassins, la destruction des ouvrages hydrauliques est la solution majoritairement choisie: 75% d'effacement en Seine-Normandie, 72% en Artois-Picardie, 58% en Loire-Bretagne par exemple (voir les données in CGEDD 2016). Or, cette destruction aboutit à faire disparaître ou à assécher :
- des étangs,
- des retenues et lacs,
- des biefs et canaux,
- des annexes hydrauliques intermittentes (type déversoir).
Il en résulte la diminution de la surface en eau, de la diversité des biotopes, des zones favorables à certains espèces faunistiques et floristiques. L'impact écologique et le bilan de biodiversité de ces opérations ne sont presque jamais étudiés, et quand ils le sont, c'est presque toujours à travers des évolutions de certaines populations piscicoles spécialisées. L'avifaune en particulier n'est pas inventoriée avant et après, pas plus que l'herpétofaune (ou, dans un autre ordre idée, la biomasse totale et sa productivité).
Ce que vous pouvez faire
Il appartient aux associations de moulins, étangs, riverains, protection du patrimoine naturel et/ou du patrimoine culturel de défendre la diversité écologique et paysagère des bassins versants, en particulier le maintien des zones humides naturelles comme artificielles.
Face à tout projet d'effacement d'ouvrage hydraulique conduisant à la réduction de la surface en eau (temporaire et permanente) et à une perte de fonctionnalité (comme l'auto-épuration), il doit être demandé au porteur de projet une étude d'impact complète sur la biodiversité et la fonctionnalité des milieux, et en particulier ce respect des zones humides tel que la loi l'exige (L 211-1 CE, Ramsar).
Nous pouvons signaler que dans le cas des ouvrages de Prusly-sur-Ource et Villotte-sur-Ource, le commissaire enquêteur a considéré comme recevable notre demande d'évaluation de l'impact écologique lié à la disparition des biefs et annexes hydrauliques. Le syndicat SMS (ex Sicec) a exposé qu'il ne souhaitait pas donné suite, mais à la dernière réunion du comité syndical, une majorité d'élus ont refusé de voter le caractère d'intérêt général du projet, évitant ainsi un contentieux que notre association aurait porté. Cela démontre que l'on peut agir pour protéger les patrimoines naturels et culturels. Notre association est à disposition pour vous conseiller sur des cas concrets où des biotopes d'intérêt sont ainsi menacés.
A lire en complément pour formuler vos requêtes
Evaluer le préjudice écologique lié à la destruction des retenues, biefs et étangs
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire