Scandale à Pont-Audemer : l'Agence de l'eau Seine-Normandie envisagerait d'engager plus d'un million € d'argent public pour casser une usine hydro-électrique en état de fonctionnement. On marche sur la tête, alors que nous sommes très en retard sur nos objectifs d'électricité renouvelable ni fossile ni fissile. Le ministère de l'écologie doit ordonner à ses fonctionnaires de cesser cette gabegie contraire aux priorités de la France dans la transition énergétique, et manifestement opposée à l'intérêt général. Les seuls bénéficiaires sociaux de ces mesures sont le lobby des pêcheurs de salmonidés qui, en Normandie, fait pression sur les services de l'Etat pour détruire tous les ouvrages. Mais on peut faire migrer des poissons sans effacer les seuils et barrages. Nicolas Hulot avait constaté que notre maison brûle et que nous ne faisons rien : c'est pire en réalité, puisque l'Etat dépense des sommes et des efforts considérables pour détruire ou pour empêcher l'équipement du potentiel bas-carbone des rivières françaises.
L'affaire est rapportée par le site Paris-Normandie. Le maire de la ville explique ainsi : "Je ne suis pas un spécialiste de la remontée des espèces, j’ai donc suivi les recommandations de l’Agence de l’eau en ce qui concerne les aménagements à prévoir pour rétablir la continuité écologique de ce que l’on appelle le nœud de la Risle. La ville est désormais propriétaire de ce barrage et n’a pas déboursé un seul centime. En effet, l’Agence de l’eau a financé, à 100 %, le rachat et les aménagements qui sont prévus".
Mais en fait, depuis 5 ans, les fonctionnaires de l'Agence de l'eau Seine-Normandie exercent un chantage financier à seule fin de mener un programme idéologique : détruire le maximum d'ouvrages. Un programme qui est soutenu en Normandie par le lobby des pêcheurs de saumons et truites de mer, seuls réels bénéficiaires sociaux de ces mesures (voir leur bilan sur la Touques, leurs dérives sur la Dives, leur rôle dans la casse des barrages de la Sélune).
Richard Rodier co-signataire d’un courrier adressé la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) de l’Eure avec une copie adressée au préfet et au sous-préfet de l’Eure, n'est pas du tout d'accord avec cette vision :
"contrairement à ce que l’Agence de l’eau indique pour faire voter la subvention qu’elle octroie à la ville et faire disparaître la turbine, aucun comité de pilotage n’a jamais décidé d’effacer le barrage, bien au contraire. Lors du comité de pilotage n°10, il a été simplement décidé de choisir le meilleur scénario en tenant compte du potentiel électrique qui doit absolument être conservé. Cette interprétation est très grave car ce mensonge présenté dans le dossier remis à la commission des aides a permis de débloquer 1,2 M€ ».
Selon le rapport du CGEDD 2016 sur les problèmes de la continuité écologique, l'agence de l'eau Seine-Normandie a déjà engagé la destruction de 75% des ouvrages hydrauliques dans les dossiers de continuité qu'elle a traités. Ce comportement est le symptôme d'une scandaleuse dérive de ses fonctionnaires : la loi n'a jamais demandé la disparition des ouvrages et la loi considère que la continuité écologique doit se rendre compatible avec l'intérêt général c'est-à-dire avec une "gestion durable et équilibrée" de l'eau, incluant les sources d'énergie bas-carbone.
Avec ses consoeurs, notre association va porter en cette rentrée une motion contre les pratiques injustifiables de l'agence de l'eau. Nous souhaitons que chaque lecteur observant ces pratiques en informe systématiquement son député et son sénateur, en leur demandant expressément de saisir du problème le ministre de l'écologie, François de Rugy. Les mesures doctrinaires et arbitraires de l'administration de l'eau cesseront quand elles seront clairement condamnées par le ministre de tutelle. Les citoyens n'ont plus à accepter la destruction du patrimoine hydraulique et du potentiel énergétique des rivières françaises au service de quelques idées extrémistes, minoritaires et déjà condamnées à de nombreuses reprises par les parlementaires.
Illustration : la Risle à Pont-Audemer, JacoNed travail personnel, CC BY-SA 3.0
Le nez du Maire tourne... Il n'a pas été à la hauteur: c'est un peu "juste" de se défausser sur le fait de ne pas être "spécialiste". Nul Maire n'est omniscient. Dans ce cas, soit on cherche à savoir, soit on consulte (ou les deux).
RépondreSupprimerIl a cédé aux injonctions de l'Agence de l'eau depuis quelques années.
Cette gabegie financière = un cas d'école pour la Cour des comptes.
Et M. le Maire n'a pas non plus entendu parler de la transition énergétique?
Les truites de mer frétillent déjà. Des barrages ils s'en cassent quelques uns comme sur l'Ource et d'autres, comme sur la Saône vont être équipés, tant mieux. Ok pour installer des turbines là où cela pèse le moins et où c'est véritablement rentable. L’équipement à tout crin est une vision qui finit par vous perdre et vous rend peu crédible.
RépondreSupprimerDépenser de l'argent public pour détruire un site qui produit déjà serait "rentable" ? On comprend mieux le problème des finances en France avec ce genre de raisonnement... Quant à votre équipement "choisi", il revient à freiner la transition énergétique quand toutes les voix scientifiques disent que c'est le problème n°1 pour l'environnement et la société. Les truites ne vont plus frétiller dans beaucoup d'endroits si les successions de sécheresses et canicules s'amplifient au cours des prochaines décennies.
SupprimerEt oui les truites et autres poissons risquent de ne plus frétiller longtemps si les agences de l'eau ne mettent pas en place des solutions pour que les stations d'épuration filtrent les métaux lourds et les produits endocriniens .
RépondreSupprimerADM 61.
"toutes les voix scientifiques disent que c'est le problème n°1 pour l'environnement et la société"
RépondreSupprimerAh bon? Pourriez-vous citer vos sources? Il me semblait que la communauté scientifique interpellait également avec beaucoup de gravité les décideurs politiques au sujet sur la perte de biodiversité et la disparition d'espèces.
Ne seriez-vous pas en train d'instrumentaliser la question du changement climatique (avec une pointe de catastrophisme) pour défendre vos intérêts et votre vision de ce que devrait être un cours d'eau?
Il y a les travaux du GIEC depuis 30 ans et encore récemment un appel de 700 scientifiques dans Libération.
Supprimerhttp://www.liberation.fr/planete/2018/09/07/rechauffement-climatique-nous-en-appelons-aux-decideurs-politiques_1677176
Leur avis : "se préoccuper du changement climatique doit réellement devenir un objectif politique de premier ordre"
Donc émettre du carbone à détruire des ouvrages au lieu d'équiper ces ouvrages pour diminuer nos émissions futures n'est pas le bon choix, si ces mots ont un sens et si ces chercheurs ont raison.
A cela s'ajoute ce que l'on observe dans nos étés caniculaires : une rivière "renaturée" dans un climat "dénaturé", cela peut aboutir à des assecs pas vraiment favorables à la vie. De même, dépenser de l'argent pour des truites dans une zone thermique où il n'y aura sans doute plus de truite en 2050 ou 2070 (car une partie du réchauffement futur est d'ores et déjà "dans les tuyaux" en raison de l'effet retard entre émissions et hausse des T), c'est un choix douteux.
Bien sûr, la biodiversité est le 2e grand thème des politiques environnementales. Et vous avez raison : ne parler que du climat sans parler de la biodiversité, ce serait une erreur.
De nombreux ouvrages ont des aspects bénéfiques sur la biodiversité aquatique et rivulaire, et nous avons souligné la défaillance des agences publiques comme l'AFB ex Onema dans l'étude de cette biodiversité. Lire le rapport pdf à :
http://www.hydrauxois.org/2018/01/rapport-sur-la-biodiversite-et-les_18.html