La discussion au CNE avait soulevé des espoirs, car certains de ses animateurs étaient sincères. Mais le Plan en résultant est très en deçà de ce que l'on pouvait attendre.
En effet, la direction de l'eau et de la biodiversité (DEB) du ministère de l'écologie a maintenu l'essentiel de ses positions contestées et a refusé en conséquence les solutions les plus simples : déclasser un grand nombre de cours d'eau n'ayant pas de réels enjeux migrateurs ; poser la priorité aux aménagements non destructeurs et leur financement public.
Au lieu de la simplicité et de la clarté, c'est un surcroît de complexité qui a été choisi. Cela alors que les services en charge de l'eau et de la biodiversité se plaignent déjà du manque de temps et de moyens pour mener à bien leurs missions : il y a de quoi nourrir quelques inquiétudes sur la lucidité et l'efficacité de l'action publique, le pilotage de la direction ministérielle de l'eau étant aujourd'hui très critiqué sur certains choix.
Au sein de ce Plan, on note des points positifs et négatifs. En particulier :
Point positifs
- il est reconnu que certains ouvrages devront être définis comme prioritaires et d'autre non, premier pas pour reconnaître que nombre d'ouvrages sont aujourd'hui classés sans réel enjeu écologique,
- il est demandé une mise en œuvre de solutions proportionnées au diagnostic réalisé et économiquement réalistes, ce qui suggère que des options actuelles sont disproportionnées et irréalistes,
- il est posé le principe d'une conciliation des enjeux (environnementaux, climatiques, économiques, énergétiques, culturels, bien-être et qualité de vie, sportifs), donc la prime à la casse n'a pas à être un choix de première intention, comme c'est le cas dans un trop grand nombre d'instruction des agences de l'eau (par exemple 75% en Seine-Normandie, Artois-Picardie, plus de 50% en Loire-Bretagne).
- il n'y a aucune sécurité juridique ni efficacité programmatique en l'état du Plan, puisque même les ouvrages non prioritaires sont théoriquement toujours tenus d'être aménagés, dans le délai légal de 5 ans, de sorte que le propriétaire n'a pas de garantie sur son sort et risque de se retrouver dans un flou peu admissible,
- l'Etat continue d'essayer d'échapper à la loi sur l'eau de 2006 en affirmant que les solutions de continuité écologique ne seront pas indemnisées, mais feront l'objet de simples facilités fiscales (prêt taux zéro, etc.), ce qui est inacceptable. Toute charge exorbitante de mise en conformité à la continuité doit être indemnisée sur fonds publics, il n'y a pas à déroger à cette règle voulue par le législateur
Il n'y aura aucune politique "apaisée" de continuité écologique si les conditions suivantes ne sont pas remplies :
- sortir de l'arbitraire, l'analyse au cas par cas est la règle en hydrologie et écologie, mais elle ne signifie pas que les services de l'Etat (AFB, Dreal, DDT-M, agences de l'eau) peuvent prendre des arbitrages différents ou présenter des niveaux d'exigence différents pour des cas similaires, au gré du bon vouloir des agents, comme c'est hélas le cas aujourd'hui (voir ce document listant tous les types de problèmes rencontrés dans la mise en oeuvre de la continuité à partir de témoignages de terrain et retours de propriétaires),
- exempter clairement des obligations de continuité les ouvrages reconnus comme non prioritaires, par un courrier explicite de la préfecture sortant le propriétaire de l'insécurité juridique,
- indemniser les solutions de franchissement représentant des charges spéciales et exorbitantes, ce que demande la loi et ce qui est à portée des budgets des agences de l'eau, d'autant que les ouvrages prioritaires seront bien moins nombreux à traiter que l'ensemble des ouvrages classés.
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Modèle de lettre au préfet sur le Plan d'action pour une politique apaisée de continuité
Monsieur le Préfet, Madame la Préfète (conserver la mention correcte)
Par la voix du ministre d'Etat en charge de la Transition écologique et solidaire, le gouvernement a annoncé en août 2018 l'adoption d'un Plan d’action pour une politique apaisée de restauration de la continuité écologique.
Ce Plan comporte 7 actions dont l'exécution et la coordination reviennent principalement aux services de l'Etat.
Nous observons en particulier que ce Plan demande sur les rivières classées en liste 2 au titre de la continuité écologique de :
- prioriser les interventions, et déjà définir en concertation avec les premiers concernés ce qu'est un ouvrage prioritaire (action 1)
- assurer une meilleure conciliation des enjeux environnementaux, climatiques, économiques, énergétiques, culturels, bien-être et qualité de vie, sportifs (action 2)
- chercher des solutions proportionnées au diagnostic réalisé et économiquement réalistes (action 4)
- trouver les circuits et outils financiers pour réaliser les travaux (action 5)
Comme nous avons déjà eu l'occasion de le spécifier par courrier, la plupart des propriétaires d'ouvrages hydrauliques adhérents de notre association sont toujours dans l'attente d'une solution visant à respecter les termes de la loi (art L 214-17 CE), à savoir
1) un ouvrage "géré, équipé, entretenu" , ce qui exclut toute pression à la destruction de la consistance légale autorisée,
2) selon "des règles définies par l'autorité administrative", ce qui suppose la caractérisation par vos services des enjeux propres à chaque rivière et ouvrage,
3) avec indemnisation des travaux présentant des "charges spéciales et exorbitantes", ce qui demande de flécher un financement si un dispositif coûteux est prescrit.
Le nouveau Plan gouvernemental aidera probablement à cet objectif, et il faut l'espérer car la plupart de nos adhérents sont aujourd'hui orphelins de solutions respectant la loi.
Disposés à rencontrer vos services avec les propriétaires de chaque rivière pour avancer de manière cohérente et concertée dans l'esprit "apaisé" que souhaite le gouvernement, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Préfet, Madame la Préfète (conserver la mention correcte), l'expression de nos sentiments respectueux.
On y lit aussi que les chutes de moins de 150kW c'est à dire beaucoup de jolis moulins chers à Sego n'ont qu'un intérêt énergétique qualifié de "privé" dans le texte ...
RépondreSupprimerQue signifie au juste un intérêt énergétique "privé"? Les panneaux solaires, les éoliennes et les méthaniseurs appartiennent-ils à l'Etat en France? Les milliards € de la CSPE remboursant chaque année le photovoltaïque de quelques kW à dizaines de kW jusqu'en 2030 ont quel sens au juste ? La transition vas carbone sera-t-elle autre chose que des millions de choix privés permettant de faire évoluer production et consommation ?
SupprimerLa France ratera sa transition énergétique si elle met des idéologues obscurs aux commandes des planifications publiques. Dans le cas de l'hydro-électricité, la direction eau et biodiversité du ministère de l'écologie est incompétente sur l'énergie, outre qu'elle lui est doctrinalement hostile sur les rivières. Mieux vaudrait commencer par confier ce sujet à la direction énergie et climat, dont c'est la vocation. Faire instruire l'équipement des moulins par des gens qui militent pour leur effacement, c'est un non-sens kafkaïen comme la bureaucratie nationale en produit quelques uns.
Il n'y a pas que le petit voltaïque(PV) ancien. Dans le dernier appel PV le prix est de 5ct/kWh contre 9ct/kWh pour le dernier appel Micro hydraulique (et c'est encore plus cher pour les anciens moulins reconvertis voir appel petite hydraulique 2016 : bien supérieur à 10 cts/kWh !) : on voit que le PV devient 2 fois plus compétitif que le petit hydraulique. Qui coute le plus cher à l'abonné au réseau public d'hydroélectricité ?
SupprimerVoici les tarifs de rachat PV au 3e trimestre 2018 :
Supprimerhttp://www.photovoltaique.info/+Tarifs-d-achat-du-1er-juillet-au,1079+.html
Donc si vous voulez que les moulins de petite puissance aient le même tarif (de 15, 77 à 19,30 c€ en base + primes), vous allez faire des heureux, il y a des dizaines de milliers de sites éligibles.
Les AO qui l'emportent à 6 c€, ce sont à notre connaissance des gros projets industriels. Tant mieux si le prix du solaire baisse et continue de le faire, mais personne ne pense pour autant que l'on peut concevoir un mix sur une seule source (dans le cas du solaire intermittence + baisse en hiver implique avoir des compléments).