A l'occasion d'un contentieux entre deux moulins - le moulin amont s'estimant lésé par la relance du moulin aval -, la cour d'appel de Nancy rejette la demande du plaignant, reconnaît la relance de l'ouvrage fondé en titre à l'aval et rappelle que la procédure de porté à connaissance de la remise en service (article R 214-18-1 code environnement) n'est pas assimilable à une autorisation. L'ouvrage étant déjà autorisé, les tiers ne peuvent exiger des enquêtes publiques, des dossiers d'impact IOTA-ICPE propres aux autorisations ni des consultations de l’autorité environnementale. C'est du bon sens puisque le site est en place, donc le seul changement concerne la relance hydro-électrique dans la chambre d'eau ou le coursier de roue, non une artificialisation supplémentaire du milieu ou un prélèvement différent de l'eau.
Par arrêté du 2 septembre 2015, le préfet du Jura a autorisé un pétitionnaire à disposer de l’énergie du cours d’eau de la Cuisance afin de remettre en exploitation son moulin et de créer une microcentrale électrique. Un autre moulin situé en amont s'estime lésé par cette décision, et il a requis son annulation au tribunal administratif de Besançon.
La cour d'appel de Nancy vient de statuer et de rejeter la demande du plaignant, reconnaissant la valeur de la remise en service du moulin aval.
Outre un point de fait non établi par le plaignant (rehausse de l'ouvrage par rapport au 18e siècle), on retient les points de droit suivant :
"Le préfet ayant retenu cette hauteur pour fixer la puissance maximale brute hydraulique de l’installation à 68,4 kilowatts, il a pu légalement, sur le fondement du 1° du II de l’article R. 214-18-1 du code de l’environnement précité, reconnaître le droit fondé en titre attaché à l’ouvrage et sa consistance légale. Par conséquent, la remise en exploitation des installations litigieuses ne nécessitait, contrairement à ce que fait valoir M.F..., aucune autorisation.
En deuxième lieu, la remise en exploitation des installations litigieuses n’étant pas soumise à autorisation, les moyens tirés de l’absence d’enquête publique, du caractère incomplet du dossier et de l’absence de consultation de l’autorité environnementale ne peuvent qu’être écartés comme inopérants."
Cela signifie qu'une relance de moulin fondé en titre (avant 1790 en rivière non domaniale, avant 1566 en rivière domaniale) ou fondé sur titre d'une puissance de moins de 150 kW (entre 1790 et 1919) relève de la simple déclaration au préfet et n'est nullement assimilable à une procédure d'autorisation, avec les formalités qu'implique l'autorisation.
Cette décision de la cour propose une lecture logique et attendue du droit. Le préfet peut constater la perte du droit d'eau pour ruine ou pour changement d'affectation, il peut dans des cas de force majeure établis par ses services (risque démontré sur la sécurité et la salubrité) dénoncer l'existence d'un ouvrage, mais il ne peut empêcher une relance d'ouvrage autorisé, ni exiger une nouvelle autorisation alors que l'ouvrage est déjà régulièrement installé dans sa consistance légale, disposant à ce titre du droit d'usage de l'eau. Il en va donc de même pour les tiers, qui ne peuvent invoquer un changement de l'équipement énergétique d'un site déjà autorisé pour exiger des procédures non requises en ce cas.
Source : Cour d'appel administrative de Nancy, arrêt n°18NC00456, 25 avril 2019
Ça, c'est quand le Préfet dit "oui". Sinon, ceux qui ont affaire à une DDT(M) rétive doivent compter avec les aléas des procédures administratives ; compter 5 ans pour les plus chanceux... le Tribunal Administratif commence par donner 6 mois à la DDT(M) pour répondre, puis pourra laisser le dossier dans un tiroir une petite année avant de jeter l'impétrant sans procès ni possibilité d'appel en rendant une ordonnance R222-1 CJA "demande manifestement irrecevable". On n'a pas idée de déranger ces pauvres magistrats surchargés pour une simple ouverture de robinet ?
RépondreSupprimerCertains services instructeurs abusent en effet du R 214-18-1 CE pour le transformer en quasi-autorisation et surtout pour imposer des demandes en totale disproportion avec les impacts de la relance comme avec les moyens du pétitionnaire, espérant que cela va décourager le projet.
SupprimerIl faut se défendre pour appliquer ce "bon sens"
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