Bonne nouvelle pour le mouvement des moulins et étangs en lutte contre la destruction imposée des ouvrages : lorsque le juge administratif est saisi pour faire constater un excès de pouvoir de l'administration, il peut désormais à titre subsidiaire abroger l'ensemble de la règlementation concernée si celle-ci est devenue illégale. C'est le cas de nombreux SDAGE, SAGE, SRADDET et autres règlements qui prévoient la promotion de l'effacement d'ouvrages hydrauliques, une disposition devenue illégale depuis l'été 2021. Si l'administration eau et biodiversité ne comprend pas encore qu'elle doit appliquer la loi, la suppression pure et simple par la justice des dispositions antérieures dont elle se réclame l'aidera éventuellement à le comprendre...
Un changement de loi est un changement de circonstances de droit : il rend caducs certains textes dont la légalité émanait de formes anciennes de la loi. Les règlementations, qui sont inférieures à la loi dans l'ordre juridique et qui visent généralement à l'appliquer, doivent donc se mettre à jour quand les lois évoluent. Mais c'est loin d'être toujours le cas.
La théorie juridique du changement de circonstances affectant la légalité des actes réglementaires a déjà presqu'un siècle (Conseil d'Etat, section du contentieux, Sieur Despujol, 10 janvier 1930). Elle entraîne l’obligation pour l’administration d’abroger un règlement devenu illégal, tout intéressé étant recevable à demander, par la voie du recours pour excès de pouvoir, l’annulation du refus d’y déférer ou du règlement lui-même. Mais cela dans le délai de recours contentieux de deux mois à partir de leur publication, délai rouvert par la publication de la loi venue ultérieurement créer une situation juridique nouvelle.
Le 19 novembre 2021, dans son arrêt Association ELENA et autres, la section du contentieux du Conseil d’État a fait évoluer l’office du juge de l’excès de pouvoir, consacrant la possibilité pour ce dernier d’être saisi à n'importe quel moment de conclusions subsidiaires tendant à l’abrogation pure et simple d’un acte réglementaire devenu illégal:
"ainsi saisi de conclusions à fin d’annulation recevables, (...) le juge peut également l’être, à titre subsidiaire, de conclusions tendant à ce qu’il prononce l’abrogation du même acte au motif d’une illégalité résultant d’un changement de circonstances de droit ou de fait postérieur à son édiction (...) jusqu’à la date de clôture de l’instruction et pour la première fois en appel".
Désormais, "dès lors que l’acte continue de produire des effets", il appartient au juge de se prononcer sur les conclusions subsidiaires "dans l’hypothèse où il ne ferait pas droit aux conclusions à fin d’annulation et où l’acte n’aurait pas été abrogé par l’autorité compétente depuis l’introduction de la requête".
Ces points assez techniques mais important doivent être portés à la connaissance des associations de protection des ouvrages hydrauliques et de leurs conseils juridiques. En effet, la loi sur la continuité écologique a changé en 2021, elle proscrit désormais de détruire l'usage actuel ou potentiel d'un ouvrage hydraulique, en particulier de détruire les seuils et chaussées de moulins. Or, dans les cas où l'administration refuse d'appliquer cette loi, ce changement circonstanciel de droit permet de saisir le juge du recours en excès de pouvoir pour lui demander d'abroger les textes règlementaires anciens dont se réclame l'administration. Ces textes sont très nombreux, ce sont notamment les SADGE et les SAGE qui organisent la gestion des bassins versants et le financement des opérations, mais aussi divers règlements édictés par les préfets et inspirés de la gestion des poissons migrateurs.
Les particuliers et les associations engageant un recours contentieux face à des casseurs d'ouvrage hydraulique doivent donc en profiter pour faire abroger ces règlements devenus illégaux.
Source : Conseil d'Etat, arrêt n°437141, 19 novembre 2021
Post scriptum : le changement de la loi Climat et résilience survenu en 2021 ne concerne que les rivières classées au titre de la continuité écologique (rivières sujettes à classement au terme de l'article L214-17 Code environnement). Il ne concerne pas des droits d'eau abandonnés, ce qui est la plus grosse erreur que puisse faire un propriétaire abusé par des pressions administratives ou politiques locales, ou d'autres rivières non classées. Il revient au mouvement des ouvrages hydrauliques d'aller au terme de l'évolution de la doctrine publique de l'eau pour demander lors de la prochaine législature, et à l'occasion d'une loi sur l'environnement, que la gestion équilibrée et durable de l'eau (article L 211-1 Code environnement) intègre à son tour ces dispositions générales de protection des ouvrages. En effet, tant les pratiques des rivières que l'esprit des lois votées depuis 20 ans et la jurisprudence récente du conseil d'Etat indiquent que les objectifs de continuité biologique ou sédimentaire doivent être recherchés par des moyens qui se concilient avec les autres usages de l'eau. Faire consigner cela de manière explicite dans la loi permettra de couper court à toute vision extrémiste de la destruction d'ouvrage au nom du retour à une nature sauvage, vision ayant hélas contaminé certains esprits alors qu'elle n'a jamais été la finalité des lois françaises, ni l'intérêt général du pays.
Ah bon, j'avais cru comprendre que vous alliez déférer devant les tribunaux administratifs tous les SDAGE, SAGE SRADDET de France et de Navarre qui auraient l'outrecuidance de maintenir le terme "effacement" applicable à des ouvrages en liste 2 ? Donc si comprends bien l'offensive de grand style que l'on attendait se transforme en guérilla ? En tous cas on n'a pas l'impression que les programmes d'intervention des agences effacent l'effacement des obstacles transversaux de leurs aides bonifiées ... il est vrai qu'il reste tous les obstacles hors liste 2 ... et ceux en liste 2 dont le motif d'effacement n'est pas la continuité, à commencer par la demande du propriétaire...de bons moments dans les prétoires en perspective sans compter la nouvelle législature qui n'aura sans doute rien de plus urgent que de poursuivre cette ridicule jacquerie des moulins à eau...
RépondreSupprimerNon, nous demandons d'annuler au cas par cas de nos contentieux. Déjà le SDAGE Seine-Normandie et le SDAGE Loire-Bretagne, en cours d'examen par le juge. Soyez patient. La ridicule prétention à revenir à des rivières soi-disant sauvages a fait pschitt au parlement et au conseil d'Etat, mais pas encore chez divers lobbies et administrations ayant fait leur beurre dessus. Il faudra certainement que la prochaine législature donne plus de profondeur et de vigueur à la réalité des nouveaux écosystèmes de l'Anthropocène, des usages hybrides de la nature, des priorités dans les choix publics en écologie, nous y travaillons.
SupprimerPas d'inquiétude, à la prochaine loi, nous remettrons les pendules à l'heure. Tous les pays de l'Europe s'engagent dans les effacements, nous sommes les pionniers, nous nous relancerons. Et ce malgré tout votre argent spolié sur le dos de nos impôts (combien le rachat obligatoire du MW ?). La vengeance est un plat qui se mange froid et il s'agit plus d'une choucroute que d'une salade désormais. L'obscurantisme finira par être vaincu.
RépondreSupprimerL'exemple français montre qu'un certain "obscurantisme" de vénération de la nature avec indifférence à l'économie et à la société mène dans le mur de l'incompréhension et du conflit. Nous sommes fiers d'avoir contribué à le faire savoir, et nous pensons que cela pourra en effet servir à d'autres pays européens, comme exemple à ne pas suivre. (Mais à dire vrai, pas grand monde n'a envie de suivre la gouvernance française, en environnement comme ailleurs.)
SupprimerIl est tout à fait logique que vous souhaitiez poursuivre votre propre agenda destructeur au nom d'une vision intégriste de ce que devrait être la nature. Ainsi va l'Anthropocène, des modes différents d'interprétation, valorisation et appropriation de leur environnement par les humains. Déjà, veillez à avoir au parlement assez d'élus partageant votre vision : cela ne semble pas gagné, n'est-ce pas?
Si, ça progresse, n'oubliez pas que les élus n'ont pas oubliés votre tartufferie et qu'ils sont vexés. Vous aller le payer en temps voulu. vous êtes fier mais surtout vous êtes bien enrichi :)
SupprimerUne vision intégriste de ce quoi doit être la nature ? Vous parlez de vous avec votre volonté d'interdire ? Aucune vénération de la nature mais cela vous amuse d'aller sur le thème de la religion pour faire oublier les thèmes de l'économie et de la fausse transition écologique.
ça se passe bien le remplacement d'une énergie pilote par une énergie transitoire ? Mis à part votre portefeuille bien entendu.
Il n'est pas interdit à un particulier de détruire un ouvrage, il est interdit à l'administration de le proposer comme application de l'article L 214-17 CE. Vous voir faire l'éloge de la liberté serait évidemment grotesque, mieux vaut vous abstenir : les tenants de la rivière sauvage ont un discours très clair et très cohérent, il faut interdire et même éliminer tout impact humain sur la rivière. C'est bel et bien de l'intégrisme (une vision extrême de l'intégrité biotique d'un milieu sans humain), nous le répéterons aussi longtemps que nécessaire pour que les élus le comprennent et qu'ils continuent d'empêcher l'administration française d'adopter des visions aussi marginales et radicales.
SupprimerQuant au portefeuille, vous n'avez aucune pudeur quand on voit l'argent public dilapidé pour ces lubies. Cela aussi, les élus le comprennent, la tendance n'est pas à payer des danseuses quand il y a des urgences, y compris en écologie mais sans rapport aucun avec la destruction des ouvrages hydrauliques.
Ouh, je crois avoir toucher une corde sensible. N'oubliez pas de dire que c'est aussi l'argent public qui finance vos petites turbines pour enrichir un particulier et que c'est aussi l'argent public qui est obligé de racheter votre kw.
SupprimerToujours pas de vision extrême et je parle de liberté si je veux, nous sommes quand même sur le site de la propagande alors bon ..... Il ne faut pas éliminer tout impact humain, vous êtes dans la caricature mais c'est bien normal, vous n'avez pour vous ni la science, ni le dérèglement climatique (sans eau pour les turbines), ni l'avenir.
L'argent public finance en partie les producteurs qui injectent de l'énergie renouvelable bas carbone dans le cadre des contrats d'achat EDF, réglementés par l'Etat, au même titre que d'autres énergies. L'argent public ne finance pas les particuliers qui auto-consomment. La loi a précisé expressément (en 2019) que la petite hydro-électricité fait partie de l'engagement de l'Etat dans le cadre de l'urgence écologique et climatique. Vous avez des problèmes avec la loi, mais en démocratie il est conseillé de lui obéir. Ce n'est pas une "corde sensible", c'est vous qui avez une obsession un peu malsaine de l'argent, en même temps qu'une parfaite mauvaise foi à ignorer les milliards d'euros dépensés depuis 40 ans de politique pour les grands migrateurs.
SupprimerVous avez du mal à assumer vos propres positions, c'est sans doute pour cela que les parlementaires ne vous jugent pas convaincant. Vous ne voulez pas supprimer tous les impacts humains sur la rivière... sauf que vous posez comme idéal et comme référence de comparaison les rivières qui n'ont aucune ou quasiment aucune modification physique, chimique, biologique induite par les humains. C'est cohérent comme raisonnement mais ce n'est pas compatible avec les humains et les usages humains que vous voulez chasser de ces rivières. Vous avez donc obtenu la réponse attendue à ces vues intolérantes, dont les excès nuisent plus qu'autre chose à l'écologie.
Ah bon ? Le SDAGE Loire Bretagne et le SDAGE Seine Normandie ? Mais à quoi cela sert-il : ces deux SDAGE seront remplacés dans moins de 4 mois ? Réservez vos munitions pour l'édition suivante ! Au mieux ils seront annulés quand il n'auront plus cours ! Du reste ce sera difficile de démontrer un quelconque lien entre le "prétendu complot" dont vous pensez que vos chers moulins sont les victimes, et des textes fort peu prescriptifs comme l'indiquent précisément les récents arrêts du Conseil d'Etat, arrêts dont l'usage est de les considérer comme une injonction faite aux législateurs de légiférer ... Rien n'est plus dangereux que la victoire totale et rien n'est plus funeste que de la rechercher ....
RépondreSupprimerNous demandons l'annulation des programmes d'intervention (PI) des agences qui durent jusqu'en 2024, à titre subsidiaire le juge pourra prononcer l'illégalité des SDAGE concernés (donc l'impossibilité de s'en réclamer jusqu'en 2024). Comme vous le savez sans doute, il y a décalage entre les textes de programmations (SDAGE) et les programmes d'exécution (PI).
SupprimerNous avons par ailleurs écrit aux 6 préfets de bassin pour les prévenir que les formulations des 6 SDAGE en cours de finalisation (ceux dont vous parlez) comportent des dispositions illégales qui conduiraient à la demande d'annulation au contentieux s'ils ne sont pas modifiés. Mais les services juridiques des agences sont informés, ne vous en faites pas.
Vous inventez la notion de "complot", mais les choses sont parfaitement claires et documentées dans plus de 1000 articles de ce site. Ce n'est pas du tout un "complot", c'est une coalition d'intérêt et de vue entre une fraction de la bureaucratie du ministère de l'écologie, divers acteurs économiques et sociaux. Cela existe dans plein d'autres domaines dans le cadre de l'étrange gouvernance de la démocratie française, cela donne lieu dans plein d'autres domaines à des démarches similaires à celle que mènent notre association et ses consoeurs partout en France. (Nous avons été à bonne école, cela fait bien 50 ans que les associations écologistes dénoncent certaine dérives de ce genre. Le fait d'avoir atteint un poste de pouvoir dans l'appareil d'Etat ne rend pas excusable le principe de l'abus de pouvoir que ces associations ont si souvent dénoncé...)
Enfin, il n'est pas question de victoire ou de défaite in fine, il est question de cesser les conflits et contentieux en fixant une politique de continuité écologique à objectifs raisonnables et moyens raisonnables. Nous y viendrons, le ton a déjà beaucoup changé en dix ans, il est reconnu par la plupart des acteurs que des choix malheureux ne sont pas à reconduire.
Non. Vous parlez de conflits d'intérêt ? Vous osez ? Merci pour la rigolade. Les gens qui produisent leur électricité ne paient pas ? Incroyable. Sauf qu'il y a obligation de rachat de tout le surplus. C'est de ça que je parle mais je comprends vos détournement. Et sinon la lutte contre le changement climatique avec une production électrique majoritairement decarbonee ça avance ? Surtout en voulant remplacer du pilote avec du transitoire. Donc oui vous prenez L argent du contribuable pour des intérêts privés. Donc oui vous allez perdre.
RépondreSupprimerPour ce qui est de vos 1000 articles fallacieux. Demandez aux scientifiques sur lesquelles vous parlez. Au moins 70% de vos articles peuvent être jetés à la poubelle car mensongers.
C'est terrible ça de poser un idéal parfait et d'essayer dy tendre. Un peu comme un idéal d'énergie totalement decarbonee, impossible mais souhaitable. Quelle horreur de faire ça. Vraiment de l'extrémisme !
L'avantage avec vous c'est que plus vous parlez plus vous vous enfoncez
Dur de vous suivre.
Supprimer- Les autoproducteurs ne touchent pas un centime d'argent public et contrairement aux gens qui donnent des leçons depuis leur canapé, ils participent activement à la transition énergétique de leur pays, sur leur argent privé. Nous nous honorons d'avoir beaucoup d'autoproducteurs dans nos rangs. Quand les parlementaires visitent leurs sites, ils comprennent l'inanité des arguments que vous tenez.
- Que signifie énergie "pilote" ou "transitoire"? Si vous voulez dire "pilotable" et "fatale", et que la seconde vous pourrait condamnable, alors vous êtes opposé non seulement à l'hydraulique, mais aussi à l'éolien, au solaire et même au nucléaire fluvial qui est obligé d'arrêter sa production en cas de niveau trop faible de l'eau. On ne va pas remettre un sou dans la machine en vous demandant vos solutions... Aucun scénario d'aucune instance ayant travaillé ces questions (AIE, RTE, GIEC etc.) ne prévoit de transition énergétique possible sans inclure une très forte dose d'énergie fatale, et bien sûr sans inclure l'hydraulique aussi, qui est parfois pilotable, parfois non. Si vous aimez l'hydraulique pilotable, vous devez militer pour la reprise de la construction de barrages-réservoirs dans les vallées françaises.
- Vous estimez donc que 300 de nos articles sont corrects... c'est déjà beaucoup. :-) Pour les autres, nos colonnes sont ouvertes aux scientifiques qui voudraient apporter des précisions ou des contradictions. Mais si vous nous lisez bien, la question n'est certainement pas soluble dans une sorte de référence à "la science qui dit le vrai". Les humains n'ont pas les mêmes représentations et les mêmes attente vis-à-vis de la rivière (de l'eau en général), vous pouvez faire 20 000 articles scientifiques sur les communautés biotiques des rivières, c'est un peu indifférent à cela. Ce genre d'article est lui-même une certaine représentation de la rivière comme phénomène biophysique, souvent avec un arrière-plan de "naturalité" comme "normalité". Mais justement, cela fait partie de la diversité des représentations, on peut aussi bien se représenter la rivière comme phénomène historique, juridique, social, économique, etc. Il n'est écrit nulle part que "la vérité" d'une rivière serait dans son état biophysique, ce dernier est un paramètre de nos appréciations parmi d'autres.
- La science au sens où vous l'entendez peut éventuellement servir à réfuter une assertion fausse (ce qui est différent d'imposer une vérité). Par exemple l'assertion "les ouvrages hydrauliques n'ont aucun impact sur les milieux" est fausse, c'est scientifiquement démontrable. Mais cela tombe bien, nous n'avons jamais émis une telle assertion, nous sommes tout à fait persuadés qu'un ouvrage hydraulique crée une modification des propriétés chimiques, physiques et biologiques de l'eau et des rives ! Il s'agit de discuter de ces modifications, dans une discussion qui devient vite non scientifique car relevant de jugements de valeur (est-ce bien ou mal, grave ou pas grave, beau ou pas beau, utile ou pas utile... choses bien plus dures à objectiver).