14/06/2024

Les truites meurent, les moulins meurent, les dogmes survivent

Le rapport du WWF "Pour des rivières vivantes" (2024) révèle un constat alarmant : la population de truites de rivière en France a chuté de près de 44 % en 23 ans, malgré des décennies de politiques publiques visant à préserver l'espèce. Les mesures drastiques prises contre les ouvrages hydrauliques, censées favoriser la libre circulation des truites, n'ont pas porté leurs fruits. Pire encore, d'autres espèces migratrices voient leur situation empirer à mesure que l'on détruit les ouvrages et assèche les rivières. Face à ces résultats, les instances publiques continuent de s'accrocher à des dogmes dépassés, sacrifiant moulins et étangs sans apporter les bénéfices escomptés pour la biodiversité aquatique. Quand abandonnera-t-on ces croyances néfastes pour adopter des solutions réellement pertinentes?


Un sinistre exemple de la destruction forcée des moulins à eau, sur pression d'administrations militantes et de lobbies minoritaires. Source


Le rapport Pour des rivières vivantes du WWF 2024 présente une analyse détaillée de l'évolution des truites dans les rivières françaises. 

Les données sur les poissons proviennent de l'Office français de la biodiversité (OFB) et auparavant de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), couvrant la période de 1995 à 2018. Ces données sont issues des stations de suivi des milieux aquatiques et des agences de l'eau. Un modèle linéaire a été utilisé pour calculer la variation annuelle de l'abondance des truites. Les résultats sont agrégés par année en utilisant une moyenne géométrique pour obtenir une estimation des tendances.

Résultat : la population de truites de rivière a diminué de 43,88 % en 23 ans.

Ce résultat intervient alors qu'à la suite de la loi pêche de 1984, de la loi sur l'eau de 1992, de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques de 2006, les pouvoirs publics ont pris des mesures de plus en plus strictes sur les ouvrages hydrauliques : découragement des constructions de nouveaux seuils ou barrages, obligation de mettre des dispositifs de franchissement des poissons, règles de continuité écologique ayant mené à détruire des milliers d'ouvrages hydrauliques, particulièrement dans des têtes de bassins et fleuves côtiers.

La truite est souvent présentée comme l'espère-repère des poissons migrateurs vivant en eau douce seulement. Des fédérations de pêche ont mené un intense lobbying pour détruire des moulins, des forges, des étangs, des barrages au prétexte que ce choix payé par argent public allait permettre à la truite de circuler librement et de trouver des habitats favorables.

Il n'en est rien. 

Non seulement les truites communes de rivière ne se portent pas mieux, mais bien d'autres espèces migratrices ont vu leur situation s'aggraver depuis 40 ans (saumons atlantiques, anguilles, aloses). La raison n'en est pas les ouvrages hydrauliques, mais d'autres causes comme la pollution des eaux, le réchauffement climatique, l'arrivée d'espèces exotiques (dont les espèces parasitaires), la baisse de la ressource liée à des excès de prélèvement, à des assecs plus sévères et à des rectifications faisant d'évacuer l'eau trop vite en saison pluvieuse.

Malheureusement, alors que la loi française a déjà demandé de respecter l'usage actuel et potentiel des ouvrages hydrauliques, les appareils publics en charge de l'eau continuent trop souvent de défendre leurs dogmes: dans de nombreux bassins versants, les agences de l'eau, l'Office français de la biodiversité, les syndicats de rivière, les associations à agrément public subventionnées persistent à affirmer qu'il faut détruire les moulins et étangs à marche forcée. 

Les faits leur donnent tort, avec désormais 40 ans de recul. 

Quand va-t-on cesser ces dogmes qui tuent les moulins sans sauver les truites ?

1 commentaire:

  1. Bonjour,
    vos articles cherchent l'excellence. Merci.
    Mais pour les truites, le sujet est bien plus simple: elles ont été bassinées à outrance depuis 1960 provenant de piscicultures fédérales pour la satisfaction du pêcheur. Il existait 4 piscicultures dédiées dans certains départements.
    De ces empoisonnements artificiels massifs qui persistent, comment ce fait-il que les stocks s'effondrent ?
    Telle est la question fondamentale à laquelle personne ne cherche de réponse car elle ne va pas dans le sens des croyances: la qualité du milieu récepteur serait-il en cause ?
    La croyance n'investigue pas dans ce sens.
    Cordialement

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