Les dernières simulations des modèles couplés climat-hydrologie indiquent que la France métropolitaine va connaître dans les prochaines décennies des sécheresses plus prononcées en été, mais aussi des pluies se maintenant ou augmentant en hiver. Il est donc indispensable de préserver et renforcer les systèmes hydrauliques permettant de stocker l'eau, au lieu de la politique actuelle de destruction des retenues et réservoirs.
La destruction des réservoirs d'eau, comme ici sur le fleuve Sélune dans la Manche, est un choix mal-adaptatif face aux défis hydro-climatiques du pays. Les lois sur l'eau doivent notamment restaurer l'impératif de gestion hydraulique des précipitations entre saison pluvieuse et saison sèche. (Source Archives Ouest-France, dr)
Le projet Explore2, mené par l'INRAE pour la partie scientifique et l'Office iternational de l'Eau pour le transfert des résultats, vise à actualiser les connaissances sur l'impact du changement climatique sur les ressources en eau en France. Inspiré par le GIEC, ce projet fédère une quarantaine de scientifiques pour exploiter les derniers scénarios climatiques du GIEC. Explore2 se distingue par son ampleur, analysant 4 000 bassins versants avec un maillage de 8 x 8 km, permettant ainsi une analyse territoriale fine. Les données harmonisées et les outils communs facilitent l'appropriation des résultats par les acteurs de l'eau grâce à des comités d'utilisateurs intégrés dès le début du projet.
Les changements projetés dans Explore2 comprennent des incertitudes qu'il faut avoir à l'esprit : celle des émissions carbone, qui dépendent de nos choix, mais aussi celles de la physique sous-jacente des modèles. Les modèles sont en effet encore imparfaits et divergents pour la simulation des nuages, des précipitations et des flux zonaux à l'avenir. Pour toutes les variables, l’incertitude concerne l’intensité des changements. Pour les précipitations et les variables étroitement liées à celles-ci (débits annuels moyens ; débits journaliers maximum), l’incertitude concerne aussi le signe des changements, les précipitations augmentant pour certaines projections, diminuant pour d’autres. A l’inverse, les modèles sont toujours d’accord sur le signe des changements attendus pour les températures (augmentation) et aussi pour les variables qui en dépendent fortement : précipitations solides (diminution), évapotranspiration (augmentation), étiages estivaux (intensification).
Les étés plus secs, les hivers restant pluvieux
Explore2 utilise trois scénarios d'émissions de gaz à effet de serre du GIEC, allant du moins émetteur, compatible avec les accords de Paris, au plus émetteur sans atténuation, avec un scénario intermédiaire de modération. Ces scénarios ont été développés en 72 projections climatiques pour modéliser l'évolution des ressources en eau jusqu'en 2100, couvrant des aspects comme les débits, précipitations, et niveaux des nappes, au niveau national et par territoire.
Les projections indiquent un réchauffement en France métropolitaine pouvant atteindre +4°C à la fin du siècle sous le scénario de fortes émissions, avec des étés en moyenne +4,7°C plus chauds. Les précipitations augmenteront en hiver, particulièrement dans le Nord (+24 %) et le Sud (+13 %), mais diminueront fortement en été (-23 % en moyenne). Une hausse de la recharge hivernale des aquifères est prévue, excepté dans certaines régions du Sud et de la Bretagne, tandis que la fréquence et la sévérité des sécheresses météorologiques et des sols augmenteront significativement.
Les sécheresses hydrologiques seront plus sévères, avec une baisse des débits estivaux estimée à -30 % pour les fortes émissions et -12 % pour les émissions modérées. Les assèchements des cours d'eau en tête de bassin devraient progresser, touchant 27 % du territoire sous le scénario de fortes émissions à la fin du siècle, comparé à 17 % actuellement.
Ces changements nécessiteront des adaptations importantes dans la gestion des ressources en eau. Outre la sobriété des usages, il est notamment indispensable de préserver tous les systèmes hydrauliques aidant à réguler des niveaux variables de précipitations et d'écoulement, notamment les retenues et réservoirs. Cela implique d'amender dans les normes françaises et européennes les politiques de renaturation et de continuité écologique, qui ont été conçues pour la biodiversité mais sans réflexion réelle sur le changement climatique et ses conséquences.
Référence : Inrae-OiEau, Projet Explore 2, lien vers les rapports (août 2024)
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