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02/12/2018

A Genay (21), chantage à la destruction du plan d'eau et du moulin pour payer l'assainissement

Pour accorder des subventions sur une opération d'assainissement non collectif dans la commune de Genay, l'agence de l'eau Seine-Normandie exige la destruction d'un seuil de moulin et du plan d'eau du village. C'est le chantage d'une bureaucratie intégriste ayant promu la casse des ouvrages sur tout le bassin de Seine et de Normandie – une bureaucratie d'ores et déjà responsable d'une altération sans précédent du patrimoine hydraulique de notre pays. Au lieu de défendre l'intérêt des citoyens, le syndicat SMBVA appuie cette politique absurde et décriée. Mais cette écologie punitive peut-elle persister dans un tel aveuglement dogmatique alors que les Français se montrent excédés du mauvais comportement de l'Etat et du mauvais usage des impôts? Les technocrates de l'eau ont-ils compris que de telles méthodes et de tels gâchis d'argent public sont de moins en moins tolérés, surtout dans une ruralité où l'argent manque partout? Les citoyens doivent demander aux gestionnaires publics de traiter d'abord toutes les pollutions et de satisfaire les réelles exigences de qualité de l'eau posées par les directives européennes, au lieu de ces nuisances sans rapport à l'intérêt général. Autre choix prioritaire : développer l'hydro-électricité dans chaque village ayant la chance de pouvoir le faire grâce à la présence d'ouvrages. 


Notre association a reçu copie d'un courrier de l'Agence de l'eau au syndicat mixte de l'Armançon (SMBVA, ex SIRTAVA). En voici un extrait (cliquer pour agrandir) :



Dans ce courrier du 18 septembre 2018, le directeur territorial Seine Amont de l'Agence de l'eau Seine-Normandie prétend au président du SMBVA que "l'élément déclencheur" d'une aide financière de l'agence de l'eau pour améliorer l'assainissement non collectif serait la destruction de l'ouvrage hydraulique et du plan d'eau de la commune.

En d'autres termes : pas de casse de moulin et pas de suppression du plan d'eau, alors pas d'aide à la lutte contre la pollution.

Le chantage bureaucratique usuel sur les rivières, le bassin Seine-Normandie étant le plus intégriste en matière de destruction du patrimoine hydraulique (75% des sites détruits selon le rapport CGEDD 2016)

Ce courrier, que nous considérons comme un abus de pouvoir de l'agence de l'eau Seine-Normandie, sera versé si besoin dans un éventuel dossier contentieux contre la destruction du patrimoine de la commune de Genay.

Il y a des alternatives
Rappelons les faits, dans ce village de l'Auxois où coule l'Armançon.

Le propriétaire du moulin aval de la commune (moulin dit de la scierie ou moulin des Noues), agriculteur ayant acquis en 2000 le bien dans le cadre d'une préemption SAFER, a subi des pressions régulières du syndicat SMBVA et la DDT 21 l'ayant mené à abandonner son droit d'eau, de peur d'avoir à payer des amendes au titre de la continuité écologique. Le droit d'eau abandonné, le propriétaire se trouve dans l'obligation de remettre la rivière en l'état. Il faut noter que rien n'est clairement spécifié dans la loi sur ce que doit devenir un site après abandon de droit d'eau : tout serait donc encore possible, à condition de s'entendre sur l'interprétation d'une "remise en état".

Ainsi, si nous avions une ambition collective répondant aux enjeux réels de l'avenir des rivières et du climat au lieu de satisfaire des exigences intégristes et absurdes de soi-disant "renaturation", la commune de Genay pourrait décider de gérer le site à la place du propriétaire défaillant, développer un projet de petite usine hydro-électrique pour décarboner l'électricité du village (puissance de 50 kW, équivalent consommation d'une cinquantaine de familles), conserver le plan d'eau, ajouter une passe à poissons ou une rivière de contournement.

Le SMBVA avait organisé une réunion publique à Genay, le 16 décembre 2016. Une étude complète devait être faite sur le seuil, notamment sur son intérêt écologique (analyse d'effet d'épuration, analyse de biodiversité dont les rives). Rien de clair ne nous a été présenté, le syndicat semble avoir acté le principe de destruction du site, essayant de vendre aux habitants de la commune une improbable mare en guise de nouveau plan d'eau. Nous avions lors de cette réunion demandé à la salle si les personnes présentes souhaitaient garder le plan d'eau communal : tous les bras s'étaient levés. Et nous avions demandé au personnel du syndicat de prendre acte de cette volonté villageoise.

Mais en matière d'ouvrages hydrauliques, le SMBVA n'agit plus dans l'intérêt des communes ni des citoyens : il exécute simplement les ordres reçus de l'Etat de l'agence de l'eau, quand il n'en rajoute pas dans l'intégrisme de la renaturation allant bien au-delà de ce que demande la loi. Hélas, aucun avantage écologique clair ne ressort de telles mesures : on fait varier localement des densités de poissons ou d'insectes aquatiques, des caractéristiques morphologiques du lit, mais c'est loin de représenter une cause prioritaire de protection de la biodiversité.

Cette écologie punitive et bureaucratique dépense l'argent public sans intérêt clair pour l'environnement et contre l'avis des habitants : peut-elle se poursuivre à l'heure où le pays est excédé de ce genre d'excès public? Les habitants de Genay voulant préserver leur cadre de vie devront-ils enfiler à leur tour un gilet jaune pour se faire entendre? Le gestionnaire public n'est-il pas capable de se remettre en question quand il voit l'opposition de la société qu'il est censé servir?

Nous le verrons en 2019.

Vidéo sur les pratiques du SMBVA
Le scandale de la casse de la chaussée de Perrigny-sur-Armançon




A lire en complément
Lettre ouverte aux élus de l'Armançon sur la destruction des ouvrages hydrauliques
Techniques ordinaires de manipulation en évaluation écologique des seuils de moulins

27/06/2018

Destruction du seuil, de la retenue et de la chute de Perrigny-sur-Armançon

Le 26 juin 2018, en quelques heures, la chaussée du moulin de Perrigny-sur-Armançon a disparu sous les coups de la pelle mécanique, avec elle la chute et la retenue qui agrémentaient le cadre de vie du village depuis le XIXe siècle. Telle est la triste issue où mènent les idées folles que propagent des intégristes et qu'exécutent des arrivistes. La destruction précipitée et forcée des ouvrages est une page honteuse de l'histoire de nos rivières. Arrêtons cette dérive.


L'enquête publique sur le premier arrêté de 2016 avait conclu à l'absence d'intérêt écologique et à l'absence d'intérêt général du projet. Et pour cause : la chute était modeste, les relevés piscicoles ne démontraient pas d'impact majeur, l'analyse morphologique du bassin n'avait pas conclu à un déséquilibre notable, l'endroit était charmant. Outre que la rivière Armançon est fragmenté de barrages beaucoup plus importants et sans projet, mais aussi polluée et soumise à des sécheresses parfois sévères, ce qui inquiète davantage les riverains.

Mais ce chantier est caractéristique de la routine dogmatique des effacements d'ouvrage en France : on le fait car il y a un diktat du ministère de l'écologie, une obéissance sans esprit critique des rouages administratifs et des syndicats, un budget de l'agence de l'eau ayant toujours de l'argent public à gâcher sur les modes du moment, quelques élus locaux prêts à tirer la gloriole d'une soi-disant "restauration de la rivière" alors que les causes majeures de sa dégradation ne sont pas modifiées. Les mêmes faisaient le contraire 40 ans plus tôt, en aménageant à l'époque lourdement les cours d'eau et en affirmant déjà que leurs travaux étaient tout à fait indispensables au bien commun. Bêtise et vanité...

A Perrigny-sur-Armançon, l'association Hydrauxois avait requis l'annulation de l'arrêté de 2016 et la préfecture de l'Yonne avait préféré retirer le texte, obtenant un non-lieu devant la justice. Mais un autre arrêté a été promulgué en novembre 2017, cette fois sans enquête. Bel exemple du déni démocratique massif entourant la question des ouvrages hydrauliques : pourquoi donc entendre les citoyens, puisqu'ils refusent de penser comme l'Etat exige qu'ils le fassent? Si cette "écologie"-là se croit un avenir, elle se trompe.

L'association Hydrauxois appelle les propriétaires et riverains de l'Armançon à exprimer leur désapprobation au SMBVA, aux élus et aux administratifs. Ainsi qu'à s'engager à ses côtés sur tous les autres projets en cours où la destruction est encore proposée comme option, en attendant que des choix nationaux mettent éventuellement fin à cette version absurde, destructrice et coûteuse de la continuité écologique.

04/11/2016

Lettre ouverte aux élus de l'Armançon sur la destruction des ouvrages hydrauliques

Notre association a adressé une lettre ouverte à l'ensemble des élus du bassin de l'Armançon. Les délégués doivent se réunir en comité syndical le 15 novembre 2016 à Ancy-le-Franc: nous sollicitons un débat sur la politique des ouvrages hydrauliques menée par le SMBVA, ses objectifs et ses méthodes. 


Madame, Monsieur,

Si l’émotion reste vive après les destructions des ouvrages de Tonnerre, une réflexion de fond est désormais nécessaire. C’est l’objet principal de cette lettre. Veuillez en pardonner la longueur : certains sujets se prêtent difficilement au raccourci, sauf à verser dans le slogan ou la caricature. La réforme dite de « continuité écologique » en fait partie. La politique du SMBVA en ce domaine aussi.

Nombre de communes riveraines du bassin de l’Armançon possèdent au moins une retenue de moulin. Et nombre d’entre elles pourraient voir disparaître ce patrimoine sur les rivières classées au titre de la « continuité écologique ». Plus d’une centaine d’ouvrages sont concernés sur le bassin de l’Armançon, près d’un millier en Bourgogne.

Cette orientation très récente est assez exceptionnelle pour mériter notre attention.

Tonnerre et Perrigny-sur-Armançon : bref retour sur le contexte et les faits
Quelques mots sont d’abord nécessaires sur les chantiers de Tonnerre et Perrigny-sur-Armançon, qui ont été couverts par plusieurs médias et qui ont fait l’objet d’un courrier incomplet du président du SMBVA.

De manière synthétique, voici les points essentiels à retenir sur le contexte général entourant la continuité écologique aujourd’hui, donc concernant aussi les destructions de moulins sur l’Armançon:
  • la casse des ouvrages hydrauliques au nom de la continuité écologique soulève une opposition croissante en France, plus de 300 institutions et 1300 élus dont 36 parlementaires ont déjà signé un appel national à cesser les destructions (Bourgogne, première région signataire), des chercheurs de renom ont émis des réserves sur sa méthode voire sur son intérêt dans le cas des petits ouvrages de rivières ordinaires;
  • face à ces problèmes désormais reconnus, la loi a été modifiée (été 2016) pour laisser un délai de 5 ans supplémentaires à la mise en conformité et pour mieux prendre en compte la dimension patrimoniale des moulins, étangs et autres ouvrages hydrauliques;
  • la Ministre de l’Environnement, Ségolène Royal, a proposé un plan de relance de la petite hydro-électricité en 2016, en même temps qu’elle a appelé devant le Parlement à cesser la destruction des moulins et a écrit aux préfets une instruction (9 décembre 2015) pour différer ces chantiers dans les cas posant des incompréhensions persistantes;
  • un rapport du CGEDD (Conseil général de l’environnement et du développement durable) a été commandité par la Ministre, pour faire évoluer encore la réforme de continuité écologique, notamment sa mise en œuvre administrative et son financement;
  • deux rapports parlementaires 2016 (Dubois et Vigier en février, Pointereau en juillet) ont souligné cette même nécessité de remettre cette question à plat, vu les problèmes et retards observés sur le terrain.
Premier enseignement : les problèmes liés aux destructions d’ouvrages hydrauliques ne sont pas une exception locale de l’Armançon, mais bien désormais un débat politique national faisant suite au retour critique de la mise en place du Plan dit « Grenelle » 2009 de restauration de continuité écologique et aux classements des rivières arrêtés en 2012 et 2013.  Outre les évolutions déjà votées, plusieurs parlementaires ont fait part de leur souhait d’engager dès le début de la prochaine législature une approche plus équilibrée de cette question, en raison de ses coûts importants, de son ampleur peu réaliste et des dommages parfois créés aux autres usages de la rivière.

Dans le cas de Tonnerre et de Perrigny-sur-Armançon, voici les faits tels qu’ils se sont déroulés depuis 6 mois:
  • une mobilisation citoyenne (trois associations, deux collectifs riverains) s’est levée contre les projets d’effacement, perçus comme une dépense indue d’argent public, une destruction aberrante de patrimoine historique, une atteinte aux droits des riverains des retenues et un chantier vide de tout gain écologique significatif;
  • l’enquête publique a confirmé les critiques portées par les citoyens et a conclu à l’absence d’intérêt général et d’intérêt écologique du projet, le SMBVA n’ayant notamment fait aucune démonstration convaincante de la réalité d’un enjeu sédimentaire et biologique au droit des sites;
  • malgré cet avis défavorable, le SMBVA et la Préfecture de l’Yonne ont persisté dans le projet de casse des ouvrages, voté en réunion fermée du Coderst et essentiellement grâce aux voix des instances administratives au sein de ce comité, affichant ainsi leur mépris de l’avis des citoyens et du commissaire-enquêteur comme de la demande de Madame la Ministre de calmer le jeu sur les effacements contestés de moulins;
  • les décisions préfectorales ont fait l’objet d’un recours gracieux de notre association et d’une annonce de recours contentieux en cas de fin de non-recevoir;
  • sans attendre ces voies de recours, ultime possibilité pour les citoyens de défendre leur point de vue devant le juge, le SMBVA a cassé dans la précipitation l’ouvrage des services techniques de Tonnerre, le surlendemain de l’information dans la presse de l’existence de l’arrêté préfectoral;
  • dix jours plus tard, le syndicat a fait déloger par une milice de pêcheurs les manifestants pacifiques qui occupaient la partie droite de l’ouvrage Saint-Nicolas de Tonnerre et l’a détruit à son tour.
Outre les deux requêtes en annulation des arrêtés préfectoraux, deux plaintes contre le syndicat sont déposées – notamment par le riverain en rive droite du seuil Saint-Nicolas, qui n’a pas donné son autorisation aux travaux sur la moitié du lit et de la berge dont il est propriétaire (mais qui a en revanche autorisé le collectif riverain à y manifester librement).

La justice tranchera désormais. Quels que soient ses verdicts, le comportement du SMBVA a profondément choqué l’ensemble des personnes mobilisées et a renforcé leur détermination à lutter contre de telles méthodes.

La seule réponse du syndicat a été la brutalité du fait accompli, la disparition des ouvrages, l’impossibilité conséquente pour la justice de prévenir l’irréparable. L’ouvrage Saint-Nicolas était présent depuis plusieurs siècles, en très bon état de conservation, il n’y avait aucune urgence à le détruire dans un contexte aussi problématique et par des procédés aussi contestables.

Trois idées fausses sur l’opposition à la destruction des ouvrages hydrauliques
Nous avons le regret de constater que la première réaction du président du SMBVA consiste à minimiser l’existence des problèmes. On peut pointer (au moins) 3 idées fausses.

Le refus de la destruction au nom de la continuité écologique serait marginal et le fait de quelques individus isolés. Faux. Plusieurs associations sont mobilisées au plan local, et ce phénomène n’est pas nouveau : le premier projet pilote du bassin en continuité écologique (ancienne usine hydro-électrique de Semur-en-Auxois) s’est soldé par un échec en raison des propositions exclusivement centrées sur la destruction et de la très forte résistance des associations semuroises. La grande majorité des propriétaires d’ouvrages et des riverains de leurs biefs ou retenues sont aujourd’hui hostiles aux propositions qui leur sont faites par l’administration ou parfois par le SMBVA. Selon un courrier reçu ce mois du Préfet, seules 17 mises en conformité à la continuité écologique ont été effectuées dans l’ensemble du département de l’Yonne contre plus de 300 ouvrages autorisés qui auraient dû être traités en 2017, ce qui témoigne de la force du blocage sur ce dossier (94% des ouvrages orphelins de solution viable). Les proportions sont similaires en Côte d’Or. Les enquêtes publiques démontrent la réalité du problème et le refus des riverains de voir l’argent public dépensé pour modifier un cadre de vie apprécié, sans gain environnemental garanti. C’est aussi désormais un débat national ayant conduit la Ministre de l’Environnement et la Ministre de la Culture à prendre position. Près de 100 questions écrites et orales au gouvernement ont été posées ces 18 derniers mois par nos députés et sénateurs sur le thème des seuils et barrages (ce qui n’a rien d’anecdotique pour un sujet modeste eu égard à l’actualité chargée du pays).

Le propriétaire seul déciderait de l’effacement de son bien, son accord suffit. Faux. Une destruction de seuil ou de barrage est un chantier, exactement comme une construction, et ce chantier a des effets allant au-delà du génie civil de l’ouvrage lui-même : ce n’est pas simplement le bon-vouloir d’un propriétaire qui suffit à le rendre acceptable ni réglementaire. D’abord, l’argent public est dépensé (le propriétaire n’efface jamais à ses frais), donc le citoyen a un droit de regard sur l’intérêt de cette dépense (particulièrement en cette période difficile pour les personnes et les collectivités, où dilapider l’argent public à faire disparaître des ouvrages anciens ne paraît vraiment pas une priorité pour la plupart des citoyens interrogés à ce sujet…). Ensuite, casser un ouvrage a des effets sur les propriétés des tiers dans l’influence amont / aval des écoulements modifiés par le barrage (érosion, fragilisation du bâti et des berges, modification des régimes d’inondation, abaissement de la nappe, etc.) ainsi que sur l’environnement (remobilisation de sédiments pouvant être pollués, présence à vérifier d’espèces dans l’influence de la retenue, etc.). Enfin, le patrimoine et le paysage sont aussi des biens communs. C’est pour cela que tout chantier modifiant plus de 100 m du profil en long d’une rivière appelle une autorisation administrative « loi sur l’eau » et une enquête publique.

Les opposants à la casse des ouvrages ne proposeraient rien. Faux. Plus de 400 articles et dossiers ont été publiés par notre association depuis 2012 (dont 77 recensions de travaux scientifiques sur l’écologie des rivières), avec des dizaines de conférences et réunions de conciliation, des conseils aux maîtres d’ouvrage communaux ou privés, des assistances juridiques ou techniques, l’accueil d’un étudiant stagiaire ayant analysé la problématique de continuité sur un tronçon de l’Armançon. Tout cela de manière bénévole, précisons-le. Notre discours sur les ouvrages et les rivières est clair :
  • chaque site concerné par la solution de l’effacement doit faire l’objet d’un inventaire de biodiversité et le gain écologique potentiel du chantier doit y être estimé de manière correcte (par l’usage des référentiels publics déjà existants d’évaluation de qualité des milieux), sinon on produit de l’idéologie et de la gabegie, pas de l’écologie efficace ; 
  • la continuité écologique telle que la loi l’exige réellement (tout ouvrage doit être « géré, équipé, entretenu », et non arasé ou dérasé) peut être assurée par des solutions non destructrices et réversibles, dont certaines sont peu coûteuses (du plus simple au plus complexe : ouverture de vanne, augmentation du débit minimum biologique, passe à poissons, rivière de contournement). C’est dans cette direction que les établissements publics doivent travailler prioritairement avec les maîtres d’ouvrage et les riverains concernés, pas dans la vaine tentative d’imposer une destruction non consentie au nom de promesses écologiques peu crédibles ou peu tangibles; 
  • la priorité écologique des rivières est définie par l’obligation de résultats liée aux directives européennes (nitrates, eaux résiduaires urbaines, DCE, pesticides). L’argent public doit être dépensé sur les facteurs clairement identifiés de pollution et d’altération des indicateurs du bon état écologique et chimique. Nous avons encore du retard sur des exigences basiques posées par l’Europe depuis longtemps, on ne peut pas se permettre d’accumuler des mesurettes dispersées sur le « reprofilage morphologique », dont la recherche a souvent montré l’effet faible à nul sur les espèces aquatiques ;  
  • le patrimoine des moulins et étangs appartient à l’identité historique, paysagère et culturelle de nos territoires, c’est un patrimoine à préserver, restaurer et valoriser (ce que font pour leur part nos adhérents quand ils sont propriétaires) plutôt qu’à détruire ; 
  • l’équipement hydro-électrique de ces moulins peut produire une énergie locale et propre, de nature à lutter contre la menace prioritaire du changement climatique. Le potentiel total estimé dans le SAGE 2013 de l’Armançon est de 76 millions de kWh / an, ce qui ferait un équivalent revenu annuel d’environ 9 millions d’euros en cas d’équipement de tous les sites du bassin et de revente de leur production au réseau aux tarifs H2016. (L’hypothèse d’un tel équipement total n’est évidemment pas réaliste, mais cela donne un ordre de grandeur du potentiel du bassin si une politique volontariste était engagée. Même le dixième de cette production et de ces revenus serait un début très appréciable !) ;
  • de notre point de vue, la vocation d’un syndicat est de traiter l’ensemble des enjeux de la rivière et des attentes des riverains, sans exclusive, l’argent mobilisé par l’action syndicale étant celui des citoyens qui paient déjà des taxes sur l’eau et paieront demain la future taxe GEMAPI. Ce n’est pas parce que le SDAGE et l’Agence de l’eau Seine-Normandie font (aujourd’hui) peu de cas du patrimoine, du paysage,  de l’énergie et des usages locaux des ouvrages hydrauliques que ces thèmes sont pour autant absents de l’histoire et de l’avenir de nos rivières,  du cadre de vie des riverains et donc des enjeux des communes adhérentes au SMBVA. Le syndicat n’est pas un simple exécutant aux ordres du financeur public principal (Agence de l’eau), il doit aussi produire une réflexion propre, en concertation avec tous les usagers, et la défendre.


Le SMBVA a choisi de ne financer que des effacements : pourquoi cette posture excessive que n’ont pas les autres EPTB ?
Le cas de Tonnerre et de Perrigny-sur-Armançon est à nos yeux le symptôme d’un problème plus profond : l’engagement du SMBVA dans une vision partiale et partisane de la rivière, une vision où les héritages historiques ne comptent pas, où les paysages des retenues et biefs sont réputés hors de l’intérêt général, où tout pourrait finalement être sacrifié à une hypothétique (pour ne pas dire fantasmatique) « renaturation » de la rivière, soit à une interprétation assez abstraite et parfois biaisée de l’écologie des milieux aquatiques.

Exagération ? Nous n’avons pas lu une seule ligne ni entendu un seul discours du SMBVA (ou de l’ancien Sirtava) témoignant d’un intérêt réel pour les moulins, étangs et autres ouvrages hydrauliques du bassin. En revanche, de nombreux propriétaires adhérents de notre association ont été approchés par le syndicat depuis 2010  avec des incitations exclusivement centrées sur la destruction de leurs ouvrages. On peut améliorer un transit sédimentaire et un franchissement piscicole sans détruire. Mais depuis l’époque du Sirtava et jusqu’au SMBVA aujourd’hui, le syndicat n’a montré aucun intérêt pour ces alternatives « douces » et il serait bien en peine d’exposer au public des chantiers d’aménagement organisés sous sa maîtrise d’ouvrage. Ce choix du SMBVA orienté vers le seul effacement est contraire au nouveau discours des autorités (cf réponses récentes du Ministère aux parlementaires), discours posant aujourd’hui que toutes les solutions de continuité écologique sont ouvertes, que le « cas par cas » est de mise et que la destruction doit désormais être limitée à des ouvrages clairement abandonnés.

Au sein du programme d’action du Contrat Global 2015-2019 de l’Armançon, le poste de restauration de continuité écologique est l’un des plus importants du budget prévisionnel après l’assainissement : 2,659 millions d’euros. S’y ajoute la restauration des fonctionnalités aquatiques, avec 1,897 millions d’euros.

En comparaison et dans le même Contrat global, le budget du SMBVA pour la limitation des effluents agricoles n’est que de… 78 000 euros sur 5 ans. Le syndicat planifie donc de dépenser 30 fois plus à traiter des moulins qu’à aider les agriculteurs à respecter les normes sur les nutriments ou pesticides. Cette répartition paraît-elle raisonnable ou même sensée pour un syndicat qui se flatte d’agir désormais sur tous les impacts du bassin versant, et non seulement sur le lit de la rivière? Au nom de quelle découverte scientifique extraordinaire les moulins présents depuis des siècles seraient d’un seul coup devenus en 2016 un problème 30 fois plus important ou urgent pour nos rivières et nos territoires que l’aide à la transition vers une agriculture durable?

Indépendamment de cette répartition peu compréhensible des priorités écologiques et socio-économiques, la question posée est la suivante : cette somme considérable de 2,659 millions d’euros d’argent public va-t-elle servir à détruire ou à aménager des ouvrages hydrauliques? Et que met-on en face comme services réellement rendus par les écosystèmes aux citoyens du bassin de l’Armançon, c’est-à-dire en avantages justifiant ces coûts?

Hélas, le SMBVA a apporté en mars dernier une première réponse dans sa délibération n°26-2016 relative au règlement financier des opérations menées sous sa maîtrise d’ouvrage. Il a été proposé que les opérations d’effacement complet d’ouvrages aient une participation SMBVA de 95 % sur le reste à charge, l’effacement partiel de 20 à 60 %, et les autres solutions de… 0 %.

Ce choix est donc clair : le SMBVA a préféré valoriser uniquement la destruction partielle ou totale des ouvrages, sur la seule base d’un gain écologique présumé à l’avance (sans examen ni preuve), dans une indifférence complète aux autres dimensions de la rivière.

Cette position est tout à fait excessive : ailleurs en Bourgogne et en France, des EPTB et des EPAGE participent à l’étude préparatoire, à l’assistance technique et au montage financier de solutions non destructrices de continuité écologique. Pourquoi le SMBVA se singularise-t-il à maintenir coûte que coûte ce dogme de l’effacement total ou partiel ? Pourquoi refuse-t-il de consacrer les 2,6 M€ de budget à aider les communes et les particuliers à se mettre en conformité à la continuité écologique sans leur imposer au préalable la condition de la destruction, ce qui est évidemment perçu comme un chantage et ce qui renforcera l’inertie déjà observée sur ce dossier ?



Nous sollicitons 3 engagements de nos élus du bassin : un débat de fond, des bénéfices démontrés pour chaque chantier, un respect des enquêtes publiques et des recours
Notre association a pour vocation de protéger et promouvoir le patrimoine, l’environnement et l’énergie des rivières, en les conciliant plutôt qu’en les opposant. Sauf à trahir la mission qui est la nôtre, nous ne pouvons pas accepter cette politique syndicale consistant à encourager sans discernement la destruction du maximum d’ouvrages hydrauliques. Et c’est pourquoi nous continuerons de la dénoncer et de la combattre, chantier par chantier, si elle devait persister dans ses termes actuels.

Ce n’est pas un problème de personnes, mais d’idées : nous défendons une certaine vision de la rivière comme fait naturel au premier chef, mais aussi comme fait historique, culturel, économique et social. La rivière ne se résume jamais à  une collection d’espèces et d’habitats, dont la protection est bien sûr d’intérêt pour tous, elle fait aussi société pour l’homme. Cette vision appelle une gestion équilibrée, respectueuse de la nature mais aussi des héritages et des usages, faisant preuve de prudence vis-à-vis de modes trop récentes où certains s’engagent trop vite, accomplissant parfois aujourd’hui le contraire de ce qui était fait (avec la même conviction et la même précipitation) voici 20 ou 30 ans.

Les moulins, étangs et plans d’eau n’ont pas à être les boucs émissaires de la nouvelle politique des rivières, les seuls à qui on ne propose que des solutions radicales de disparition en exagérant de manière caricaturale leur impact sur les espèces aquatiques, alors que tous les autres usages du bassin versant font l’objet d’évolutions progressives et de solutions concertées.

Certains élus sont favorables à cette issue de la destruction des ouvrages : c’est peut-être votre cas et c’est bien normal en démocratie d’avoir des opinions divergentes. D’autres y sont en revanche hostiles. Beaucoup sont mal informés sur ce sujet fort complexe. Il est nécessaire que chacun exprime son point de vue pour en assumer la responsabilité devant ses concitoyens. Il est indispensable que le syndicat ne dissimule pas ses choix derrière de vagues «obligations» venues d’Auxerre, de Paris ou de Bruxelles, obligations dont il ne serait finalement que l’exécutant impuissant. Car c’est faux : il existe toujours des marges de manœuvre dans la définition des priorités, dans la discussion avec les financeurs, dans le choix des solutions concrètes.

 Nous souhaitons pour notre part trois choses de la part de nos élus siégeant au syndicat :
  • un débat de fond en comité syndical sur la politique générale du SMBVA vis-à-vis des ouvrages hydrauliques, dont ses choix financiers, un débat qui ne soit pas biaisé par la dissimulation de certaines informations et qui clarifie si, oui ou non, les élus du bassin acceptent d’encourager la seule destruction des ouvrages;
  • un engagement à produire sur les chantiers futurs payés par argent public des études préparatoires irréprochables (1), avec un état initial de la biodiversité au droit du site, un gain biologique garanti avant et vérifié après, une analyse patrimoniale et énergétique sérieuse, une enquête de proximité pour recueillir l’avis de la population et une intégration des propriétaires riverains dans le comité de pilotage du projet les concernant directement;
  • un engagement à ne pas poursuivre des chantiers de destruction quand l’enquête publique conclut à un avis défavorable et de les suspendre en cas de recours contentieux, le temps que la justice arbitre.
Ces demandes ne ferment pas la porte à la destruction de certains ouvrages, solution toujours possible et parfois justifiée. Mais elles posent des conditions scientifiques, sociétales et démocratiques à cette justification quand le syndicat y participe et quand l’argent public est engagé. Cela nous semble la base d’une politique réfléchie et respectueuse des citoyens.

(1) A titre d’exemple en cours, l’étude préparatoire de l’aménagement des seuils de l’Hôpital et Poupenot de Montbard (rivière Brenne) ne comportait dans sa phase diagnostique présentée en début d’année aucune analyse de la biodiversité des stations amont, aval et retenues, aucune analyse piscicole (IPR+) ni invertébrés (I2M2) locales en conformité aux méthodes « directive cadre européenne» d’évaluation de l’état biologique, aucun engagement sur un quelconque objectif concret de retour de certaines espèces après restauration. Quant au transit des sédiments, dont la granulométrie a pour sa part été étudiée, il n’est pas impacté par les ouvrages. Nous avons fait observer au comité de pilotage de ce projet que l’on ne peut pas continuer à proposer des dépenses considérables d’argent public (plus d’un million d’euros estimés par le bureau d’études pour effacer les ouvrages et ré-aménager les berges) et des disparitions de patrimoine hydraulique urbain sur des bases aussi minces, alors que le but premier est d’obtenir des résultats écologiques tangibles. Le même problème s’observe pour la soi-disant « auto-épuration » des rivières sans ouvrages, qui est affirmée sans preuve par certaines administrations, mais contredite en fait par de nombreuses études scientifiques. En conformité avec les conclusions de la récente expertise collective Irstea-Inra-Onema 2016 à ce sujet, nous souhaitons un partenariat entre le syndicat et un établissement de recherche pour une campagne de vérification de la charge phosphore, azote et pesticides à l’amont et à l’aval de série de retenues, afin de confirmer ou infirmer l’existence d’un effet chimique. L’écologie est une science, pas une idéologie. Elle se pratique avec des mesures et des preuves, pas avec des intuitions ni des copiés-collés de documents administratifs.

Illustrations : en haut, casse de l'ouvrage Saint-Nicolas par le SMBVA assisté de la milice privée des pêcheurs de l'Yonne ; au milieu, crue de l'Armançon à Aisy (dans ces situations, on observe que les ouvrages sont noyés et que la continuité est assurée) ; en bas, seuil de l'Hôpital à Montbard (où l'on prétend discuter des avant-projets sans même avoir établi un diagnostic biologique de la station et du tronçon, prétendue "écologie" qui néglige la connaissance des milieux, refuse d'objectiver les enjeux et applique des grilles dogmatiques).

29/10/2016

Comment disparaissent les moulins du bassin de l'Armançon

Voici des documents iconographiques sur la destruction des ouvrages de Tonnerre par le syndicat de l'Armançon SMBVA – un chantier dont l'enquête publique avait pourtant conclu à l'absence d'intérêt général et d'intérêt écologique. Outre la chaussée de Perrigny-sur-Armançon, en sursis mais toujours intacte, le syndicat développe déjà de nouveaux projets sur les ouvrages du bassin versant. Les financements du SMBVA comme ceux de l'Agence de l'eau Seine-Normandie sont entièrement orientés en faveur des destructions partielles ou totales des moulins, au lieu d'une dépense publique plus constructive incitant à les aménager pour l'écologie et les équiper pour l'énergie. Si vous souhaitez couper court à ces dérives, préserver les moulins, leurs biefs et leurs plans d'eau, documentez-vous, diffusez les informations, saisissez vos élus. Et rejoignez-nous: nous lutterons ensemble pour préserver le patrimoine et le cadre de vie de nos territoires. 

Destruction de l'ouvrage des services techniques (Tonnerre)



Destruction de l'ouvrage Saint-Nicolas (Tonnerre)


Appel à la mobilisation des riverains pour faire cesser la casse du patrimoine hydraulique et la gabegie d'argent public (cliquer pour agrandir, télécharger et diffuser)


27/10/2016

Mobilisation de nervis et destruction sous haute garde: la continuité écologique en son âge post-démocratique

Au petit matin du jeudi 27 octobre 2016, le syndicat de l'Armançon SMBVA a choisi de faire évacuer la chaussée Saint-Nicolas de Tonnerre par une milice essentiellement constituée de pêcheurs. Cela afin de libérer la voie à la pelle mécanique qui a définitivement détruit le site. Deux plaintes judiciaires s'ajoutent désormais aux deux contentieux administratifs. Ces méthodes signent par ailleurs l'entrée de la continuité écologique dans son âge post-démocratique. L'association Hydrauxois appelle donc les défenseurs du patrimoine des rivières à la rejoindre pour un combat plus offensif contre l'arbitraire, ceux qui le propagent et ceux qui l'encouragent.


Le jeudi 27 octobre 2016, à 08:00, une milice privée de pêcheurs emmenée par deux employés du syndicat de l'Armançon SMBVA a détruit les panneaux et la tente des manifestants occupant pacifiquement le site de la chaussée Saint-Nicolas, tout en repoussant violemment deux d'entre eux derrière une grille.

Par la suite, sous les yeux de pas moins de 35 personnes (gendarmes, direction et personnel du SMBVA, pêcheurs et officiels de la pêche de l'Yonne), la pelleteuse est entrée en action pour détruire définitivement la chaussée Saint-Nicolas.

Ce projet et celui de Perrigny-sur-Armançon faisaient déjà l'objet de deux avis défavorables en enquête publique (pas d'intérêt général, pas d'intérêt écologique) et de deux requêtes en annulation des arrêtés préfectoraux les autorisant. S'y ajoutent désormais deux plaintes dans l'ordre judiciaire – l'une pour intrusion et dégradation de propriété, l'autre pour voie de fait. La plainte déposée au procureur visera à  déterminer l'identité des personnes responsables de cette action directe – certaines sont déjà connues, d'autres non. Mais il s'agira également d'interroger les raisons pour lesquelles les forces de l'ordre ont toléré ces pratiques, et d'accéder aux consignes données par la préfecture de l'Yonne si l'instruction le permet.

Plusieurs enseignements doivent être tirés de ce triste épisode.

D'abord, l'équipe dirigeante du SMBVA et ses agents sont manifestement incapables de gérer de manière concertée et apaisée la mise en oeuvre de la continuité écologique. Leurs préjugés en faveur de la destruction des ouvrages anciens et leur mépris pour l'opinion divergente des riverains ne produisent que confusion et conflit. Il paraît inconcevable à l'association Hydrauxois que les mêmes dirigeants et exécutants poursuivent la même politique en 2017. Nous en avertissons d'ores et déjà les élus du bassin : sur les différents projets récemment mis en avant par le SMBVA dans son contrat global et dans ses comités syndicaux, tout chantier d'effacement de moulin mené dans des conditions similaires à ceux de Perrigny-sur-Armançon et de Tonnerre donnera désormais lieu à contentieux. Et cette fois bien avant l'arrêté préfectoral, puisque le temps de la justice n'est pas respecté par les casseurs lorsqu'elle est saisie trop tard.

Ensuite, et plus gravement, nous sommes entrés dans l'ère post-démocratique de la continuité écologique. Il était déjà manifeste que les casseurs d'ouvrages d'hydrauliques n'ont aucune envie d'argumenter sur les enjeux de fond (c'est-à-dire sur l'écologie, le patrimoine, le paysage, l'énergie, le cadre de vie des gens). Il était déjà patent que la "concertation" se limitait à l'exercice organisé d'un chantage par l'administration et le gestionnaire – vous effacez votre ouvrage hydraulique et tout se passera bien, ou vous aurez un dossier très compliqué à fournir pour payer très cher une passe à poissons. Nous montons maintenant d'un cran, avec des milices privées délogeant des manifestants et des pelleteuses faisant leur sale travail sous la surveillance de gendarmes.

Poussée au bout de sa logique dès qu'elle rencontre une résistance citoyenne, la réforme administrative de continuité écologique montre là son vrai visage: celui de la violence institutionnelle. Cela n'en rend que plus urgente l'intervention résolue du législateur pour mettre fin à ces dérives et refonder la politique des rivières.

Hydrauxois a toujours accordé la plus grande importance au débat, à l'information et à l'argumentation – en témoignent les plus de 400 articles et dossiers publiés sur le site de l'association. Nous continuerons de le faire, car nous n'allons pas sacrifier les plaisirs et les vertus démocratiques de l'échange d'idées sous prétexte que des sots, des satrapes et des sectaires les salissent. Mais il est manifeste que cela ne suffit plus.

Le tournant post-démocratique de la continuité écologique indique que les droits des riverains ne sont plus garantis aujourd'hui dans des conditions correctes. Au-delà des arguments, nous devons mener une politique beaucoup plus offensive à l'encontre de ceux qui propagent l'arbitraire et l'injustice, qu'il s'agisse d'administrations, de gestionnaires ou de lobbies. Les excès de pouvoir, les informations biaisées, les doubles standards, les combines opaques de l'oligarchie des casseurs ne peuvent plus être tolérés dans un dossier qui les accumule depuis trop longtemps. Une stratégie sera déployée en ce sens dans les mois à venir. Nous appelons d'ores et déjà tous les citoyens attachés au patrimoine des rivières à nous rejoindre et à nous soutenir dans ce combat.

Effacement d'ouvrages à Tonnerre: l'Onema avait pointé le manque de sérieux du diagnostic

La Préfecture de l'Yonne a sollicité l'avis de l'Onema sur les effacements des ouvrages hydrauliques de Tonnerre. Cet avis a été favorable, ce qui ne surprendra pas, sous réserve de diverses observations. Ainsi, l'Office déplore le manque de rigueur du diagnostic biologique préalable au chantier… ce que l'association Hydrauxois a également pointé et ce qui a notamment mené le commissaire-enquêteur à douter de la pertinence écologique du projet. On efface des barrages sans même prendre soin d'étudier les espèces en place. Ce n'est pas de l'écologie, mais de l'idéologie.

L'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema) joue notamment le rôle de conseiller technique et scientifique des services instructeurs de l'Etat pour ce qui concerne la politique des rivières.

Dans l'avis formulé le 18 février 2016 sur le projet d'effacement des ouvrages Saint-Nicolas et des services techniques de Tonnerre, l'Onema souligne à propos des paramètres biologiques (cliquer pour agrandir) :



En substance, le syndicat de l'Armançon n'a pas jugé bon étudier les poissons et insectes réellement présents dans les retenues des ouvrages et le bras concerné de l'Armançon. Et il a pris comme espèce-repère le chabot (espèce sédentaire incapable de mobilité importante) plutôt que les cyprinidés rhéophiles, les anguilles et les brochets.

Ces remarques sont aussi valables pour le cas de Perrigny-sur-Armançon.

Le syndicat SMBVA propose d'effacer des ouvrages hydrauliques sans même faire les mesures élémentaires consistant à diagnostiquer les peuplements amont, aval et dans les retenues. Ce qui est nécessaire d'une part pour vérifier au préalable qu'il existe un problème écologique sérieux appelant correction ; d'autre part pour garantir après les travaux qu'il y a eu des gains conséquents en résultat de la dépense d'argent public et en compensation, si l'on peut dire, de la destruction du patrimoine.

A dire vrai, la même légèreté prévaut sur tous les chantiers de ce syndicat, c'est aussi le cas sur les projets en cours d'aménagement de la Brenne à Montbard. L'association Hydrauxois, au comité de pilotage dans ce dernier cas, a déjà signalé au début de l'année que le diagnostic écologique de la Brenne aval est insuffisant en l'état pour justifier le moindre aménagement du seuil de l'Hôpital et du seuil Poupenot.

Le syndicat de l'Armançon prétend agir au nom de l'écologie des milieux aquatiques ; mais comme bon nombre de gestionnaires, il ne prend même pas la peine d'établir un diagnostic de biodiversité des hydrosystèmes qu'il bouleverse à la pelleteuse. Et encore moins de réfléchir aux causes quand le diagnostic est posé, la répétition de mots d"ordre catéchétiques et généralistes faisant office d'argumentation. Le manque de rigueur et d'honnêteté intellectuelles dans la mise en oeuvre de la continuité soi-disant "écologique" est désolant. Des bureaucraties appuient sur des boutons pour atteindre leurs quotas d'ouvrages détruits, sans empathie aucune pour le patrimoine, mais aussi sans rapport avec l'état réel des rivières et les priorités pour améliorer cet état. La lutte contre cette imposture est plus que jamais nécessaire.

23/10/2016

Continuité de l'Armançon et destruction d'ouvrages, une poudre aux yeux très peu écologique

Tout le monde le reconnaît: la destruction des ouvrages hydrauliques a des effets négatifs sur le patrimoine historique, le potentiel énergétique bas-carbone et le paysage de plans d'eau apprécié des riverains. On affirme que ces désavantages seraient largement compensés par des gains écologiques. Nous rappelons ici que c'est faux dans le cas de l'Armançon et des ouvrages de Tonnerre (ou de Perrigny). Les mesures de contrôle et les études scientifiques montrent que les ouvrages présents depuis longtemps sur les rivières du bassin ne posent pas de problèmes piscicoles ni sédimentaires. Leurs retenues sont des habitats singuliers, de type profonds lentiques, que l'on détruit au profit de plats courant et radiers déjà présents à l'amont comme à l'aval des sites. Les pollutions de l'Armançon ne sont pas traitées efficacement, ni même mesurées pour certaines d'entre elles malgré nos obligations européennes de le faire. Ces contaminants de diverses natures vont se diffuser plus rapidement dans les milieux aval et vers la mer après élimination des obstacles. Le dogme de la continuité appliqué aux petits ouvrages est donc pour l'essentiel une poudre aux yeux, dilapidant l'argent public et différant certaines mesures de fond pour la qualité de l'eau. 



Les ouvrages ne sont pas des obstacles aux migrateurs. La faible hauteur des ouvrages de Tonnerre (0,97 m et 1,65 m au module), la conformation de leur parement, l'existence d'échancrures latérales et la possibilité d'ouvrir les vannes les rendent franchissables aux espèces migratrices (ici anguilles) qui sont la cible première du classement des rivières au titre de la continuité piscicole. Les rhéophiles ayant de bonnes capacités de nage peuvent aussi franchir les seuils en hautes eaux. Les anguilles sont attestées dans les pêches de contrôle à l'amont du bassin et ont toujours été présentes dans les prises des pêches de loisir, au moins jusqu'au barrage de Pont-et-Massène. Les autres espèces correspondant à la biotypologie de la rivière (barbeaux, chabots, lamproies, chevesnes, brochets, vandoises, etc.) sont également présentes dans toutes les pêches de contrôle de l'Onema sur les divers tronçons du bassin.

L'indice de qualité pisciciole est déjà bon ou excellent. L'état piscicole de l'Armançon médiane, mesurée par l'Indice Poisson Rivière (IPR) pour la directive cadre européenne sur l'eau (DCE), est en classe "bonne" ou "excellente" dans les relevés de 2003, 2008 et 2012. Cet indice tend à s'améliorer graduellement depuis quinze ans. Il n'y aucune priorité à améliorer ce compartiment de qualité par des opérations destructrices d'ouvrages (dont l'un des buts affichés est de pallier une éventuelle dégradation des assemblages de poissons).

La population de poisson de l'Armançon est stable depuis plusieurs dizaines de générations. Les travaux des chercheurs (Beslagic S et al (2013a), CHIPS: a database of historic fish distribution in the Seine River basin (France), Cybium, 37, 1-2, 75-93) ont montré que "la situation des peuplements [de poissons] ne semble guère avoir évolué sur l’Armançon (un affluent de l’Yonne) entre la fin du XIXe siècle et aujourd’hui", de sorte que l'hypothèse d'un effet négatif et cumulatif dans le temps des ouvrages sur les poissons paraît infirmé par ces données de recherche. Le temps de reproduction d'une nouvelle génération de poisson est de quelques années, donc une pression sélective forte serait observable assez rapidement.

L'intérêt sédimentaire et morphologique est négligeable. Le rapport diagnostic détaillé Malavoi 2006-2007 avait déjà montré que le bassin versant de l'Armançon présente une dynamique sédimentaire préservée, malgré les petits ouvrages qui émaillent le lit de ses rivières. Ces ouvrages n'empêchent pas le transport solide lors des crues morphogènes. Le rapport SEGI 2015 a confirmé ce point en montrant que la granulométrie grossière est présente à l'amont comme à l'aval des ouvrages ("les atterrissements à l’aval des déversoirs sont constitués de cailloux / graviers qui viennent se déposer dans les fosses en aval des chutes"). En raison des usages des berges en contexte urbain, l'Armançon tonnerroise ne pourra pas retrouver d'espace de divagation latérale au droit des ouvrages (ce qui est souvent la mesure présentant le plus d'intérêt écologique pour les écotones du lit majeur inondable).



Un habitat singulier est détruit. La retenue des ouvrages présente un faciès de type "profond lentique", au lieu d'un type "plats courants - radiers" formant l'écoulement "naturel" (non contraint) de l'Armançon en son cours médian. En faisant disparaître les retenues, on fait donc disparaître un faciès singulier qui, bien que d'origine artificielle, présente des habitats particuliers que l'on ne trouve pas ailleurs sur la rivière. La morphodiversité est donc objectivement réduite à échelle du tronçon. Un habitat lentique et profond avec dépôt sédimentaire hors période de crue n'est pas un habitat "dégradé" en soi. Il sera accueillant à un certain type d'espèces (davantage thermophiles et limnophiles), il augmente toutes choses égales par ailleurs la productivité primaire à la base de la chaîne trophique, il peut servir de zone refuge à certaines conditions (comme des étiages sévères).

La biodiversité n'est pas évaluée. Les poissons, souvent cités dans les mesures de continuité écologique, ne représentent que 2% des espèces d'eaux douces. Le syndicat de l'Armançon (comme la plupart des gestionnaires) refuse de procéder à un inventaire complet de biodiversité des hydrosystèmes (amont-retenue-aval), en incluant toutes les espèces faune-flore, cela à différentes périodes de l'année. De même, nous ne disposons d'aucune comparaison entre un tronçon à écoulement libre et un tronçon à écoulement fragmenté, à conditions équivalentes d'usages des sols du bassin versant. Seul ce genre de campagne permettrait de mesurer si la présence d'ouvrages et de retenues a un effet négatif, positif ou nul sur la richesse spécifique totale du tronçon. La littérature scientifique en écologie montre que la réponse n'est pas prédictible et que des analyses au cas par cas sont nécessaires (par exemple Mbaka et Mwaniki 2015 sur les invertébrés).

Aucun effet (sinon négatif) sur la pollution de l'eau par les pesticides. Les relevés sur l'Armançon médiane montrent la présence d'au moins 10 insecticides, fongicides ou herbicides (ou de leurs métabolites) dans les eaux de l'Armançon : chlortoluron, naphtalène, métazachlore, quinmerac, propyzamide, isoproturon, éthyleneurée, deltaméthrine, atrazine déséthyl, AMPA. Les quantités sont chaque fois en dessous des normes de qualité environnementale, mais l'effet cocktail sur le vivant n'est pas évalué. Par ailleurs, ces mesures sont conservatrices. La Directive européenne de 2013 a ajouté 12 nouvelles substances prioritaires à l'annexe 10 de la DCE 2000, élevé les normes de qualité environnementale pour 7 substances déjà suivies et posé le principe d'une liste de vigilance sur 10 polluants émergents. Or, la France n'applique pas ces mesures (elle vient de recevoir une mise en demeure de l'Union européenne). Une publication scientifique de chercheurs français (Gaillard et al 2016) a montré que les retenues peuvent épurer les pesticides et a suggéré une analyse systématique du phénomène avant d'engager les mesures de continuité écologique. Plus largement, il existe une importante contamination des eaux courantes par les micropolluants (plus de 400 molécules circulant selon les campagnes nationales 2011 et 2014 CGDD, dont très peu sont analysées en routine sur l'Armançon comme ailleurs).

Les pollutions diffuses vont se diffuser davantage. La masse d'eau FR HR65, l'Armançon du confluent du ruisseau de Baon (exclu) au confluent de l'Armance (exclu), est aujourd'hui en état chimique dégradé par les HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques). La priorité dictée par directive cadre européenne sur l'eau (DCE 2000) est de trouver une solution à ce facteur dégradant. Par ailleurs, situées en contexte urbain, les retenues reçoivent les effluents et déchets flottants – les manifestants ont retiré des brassées de détritus plastiques de la zone du chantier et observé des pollutions de berge. Eliminer les retenues des ouvrages hydrauliques ne fait que diffuser plus rapidement ces pollutions dans les milieux (vers l'aval, les estuaires, les océans en dernier ressort) et rendre plus complexe leur traitement par la collectivité. Une abondante littérature scientifique montre par ailleurs que le ralentissement de l'écoulement et l'élargissement du lit provoqués par le retenues ont des effets plutôt positifs sur l'épuration locale de certains polluants. Ces enjeux écotoxicologiques doivent être vérifiés et mesurés, et non pas ignorés ou niés par une attitude indifférente aux faits et aux preuves.

Conclusion. Il existe des rivières où des populations de poissons migrateurs sont massivement bloquées, d'autres où le transit sédimentaire est profondément altéré. Il existe aussi des rivières ayant connu très peu d'impacts anthropiques dans l'histoire, dont la conservation présente un enjeu manifeste pour la biodiversité. Ces cas de figure légitiment des mesures de continuité longitudinale sur les obstacles les plus impactants (si le coût est raisonnable pour la collectivité) ou des mesures de préservation de biotopes d'intérêt avéré. Mais ce n'est pas le cas sur l'Armançon, en particulier pour les très modestes chaussées et seuils de moulin. Nous refusons l'application dogmatique et mécanique de la réforme de continuité, qui dépense l'argent public pour des mesures inefficaces, voire défavorables à l'écologie des milieux aquatiques.

22/10/2016

Tonnerre: la mobilisation continue, rejoignez la zone à défendre!

La zone à défendre du seuil Saint-Nicolas de Tonnerre a déjà résisté une semaine aux tentatives de destruction de l'ouvrage hydraulique. La semaine prochaine va être décisive : nous avons besoin de votre soutien pour continuer l'occupation pacifique du site et convaincre la préfecture de la nécessité d'un arrêt du chantier, le temps que la justice se prononce sur la légalité contestée de ces destructions. 


Une partie de la chaussée a été endommagée,
mais les manifestants ont réussi à repousser la pelle mécanique. 

Rappel des faits : malgré l'avis défavorable de l'enquête publique (pas d'intérêt général, pas d'intérêt écologique), la DDT de l'Yonne et le syndicat de l'Armançon (SMBVA) ont décidé d'effacer deux ouvrages de Tonnerre et un ouvrage de Perrigny-sur-Armançon. L'association Hydrauxois a exercé un recours gracieux contre la décision du Coderst en ce sens, auquel l'administration n'a pas répondu. A peine les arrêtés préfectoraux publiés dans la presse voici 10 jours, le syndicat a détruit à l'aube un premier seuil (services techniques de Tonnerre). L'association Hydrauxois a engagé une requête en annulation des deux arrêtés préfectoraux dès qu'elle en a eu connaissance.

La politique brutale et précipitée du syndicat de l'Armançon n'a qu'un seul but : en détruisant au plus vite les ouvrages, pousser le juge soit à un non-lieu, soit à un jugement favorable à la décision préfectorale. La politique de continuité écologique montre là son vrai visage : décision en petits comités fermés et isolés de la population, indifférence aux objections, avis d'enquête publique ou recours, mépris des voies démocratiques de résistance à des décisions perçues comme injustes et infondées par une large majorité de riverains directement concernés par la disparition des ouvrages et des retenues.

Depuis une semaine, le second seuil de Tonnerre (chaussée Saint-Nicolas) est devenu une zone à défendre. Les adhérents et sympathisants des associations et du collectif riverain opposés à la destruction ralentissent le chantier et font obstacle non-violent à l'avancée de la pelleteuse. Depuis mercredi, après intervention des gendarmes pour écarter les manifestants et laisser passer les engins mécaniques sur la voie publique, le barrage lui-même est occupé. Le propriétaire rive droite, qui n'a jamais donné son accord à l'intervention sur les berges et la moitié de lit lui appartenant, autorise les manifestants à s'y installer. Et il menace à son tour de porter plainte si les engins du syndicat pénètrent sa propriété pour la dégrader.

Le sénateur de Raincourt, qui avait déjà alerté la Ministre de l'Environnement cet été après information par notre association, a saisi vendredi son directeur de cabinet pour lui faire part de son inquiétude sur ces méthodes contestées et contestables. L'Yonne républicaine et France Bleue Auxerre ont couvert l'événement, d'autres médias sont attendus en début de semaine.

Hydrauxois appelle ses adhérents et sympathisants à rejoindre la zone à défendre pour prévenir une destruction irrémédiable de la chaussée. L'association va par ailleurs adresser une plainte à la police de l'eau pour pollution des berges en rive gauche, et elle saisira de nouveau lundi les services du préfet de l'Yonne pour solliciter l'engagement dans la seule solution raisonnable : le report du 2e chantier de Tonnerre et de celui de Perrigny-sur-Armançon, la poursuite des échanges devant la justice. Au demeurant, l'arrêté préfectoral prévoit la possibilité de prolonger la durée d'autorisation (article 7) : les travaux n'ayant aucun caractère d'urgence, ils peuvent très bien être réalisés à un prochain étiage, dans l'hypothèse où la justice reconnaîtrait leur légalité.

Pour nous aider à parvenir à cette solution, mobilisez-vous et rejoignez-nous à Tonnerre!


Le point de ralliement, chemin des Minimes à Tonnerre, aller dans le champ en rive gauche de l'Armançon. Venez nous y trouver, il y a du monde en permanence.

21/10/2016

Chaussée Saint-Nicolas de Tonnerre: toujours debout!

Le pelle mécanique n'a pu détruire qu'une partie du parement rive gauche du seuil Saint-Nicolas de Tonnerre. Désormais, les manifestants assurent une veille de nuit sur la chaussée et, jeudi matin, ils ont empêché les engins de continuer la casse. Les  gendarmes ont admis qu'avec l'accord du propriétaire rive droite, refusant que l'on détruise le site et sa berge, les citoyens pouvaient légitimement rester sur place. On attend désormais le choix du préfet et de syndicat. La solution d'apaisement consiste à arrêter les travaux pour laisser au juge l'opportunité d'analyser en toute sérénité la légalité (aujourd'hui contestée) des arrêtés préfectoraux autorisant les effacements de Tonnerre et de Perrigny-sur-Armançon. 

La pelle mécanique ne peut plus avancer, dès le petit matin les manifestants sont mobilisés.


Une partie de la chaussée a déjà été endommagée. Si le juge donne raison aux associations qui contestent la validité des arrêtés, il y aura obligation de remettre les sites en l'état. Autant s'arrêter là dans le gaspillage de l'argent public.

La belle vanne de l'ouvrage en rive gauche est encore présente. Globalement, la chaussée Saint-Nicolas de Tonnerre présentait un bon état de conservation, ce qui rend encore plus déplorable la volonté de la détruire.


Dialogue impossible? Hélas. Tant que le syndicat de l'Armançon SMBVA mènera une politique visant à casser le maximum d'ouvrages pour supprimer le maximum de linéaire de retenues – ce qui est l'objectif final de la "renaturation" si ses défenseurs sont cohérents et francs vis-à-vis de l'opinion publique –, il rencontrera une opposition résolue. Dans la grande majorité des cas, les obligations de continuité écologique peuvent être satisfaites par une simple ouverture des vannes (ou une échancrure limitée et réversible dans le seuil). Cette solution a tous les avantages : elle respecte le patrimoine et le paysage, préserve l'agrément des riverains, conserve le potentiel énergétique et la capacité de régulation des niveaux, économise l'argent public. La priorité du bassin de l'Armançon, comme de toutes les autres rivières de Bourgogne et de France, c'est de travailler sur les facteurs qui empêchent le bon état écologique et chimique des masses d'eau, au sens précis donné par la directive cadre européenne sur l'eau. Et non pas de se lancer dans une fantasmatique et ruineuse "restauration morphologique" de tronçons de rivières ayant déjà un bon état piscicole au regard de nos obligations européennes.

Pour rappel, l'indice poissons rivières mesurant la qualité biologique de l'Armançon médiane est en classe "excellente", la masse d'eau est d'ores en déjà en bon état écologique DCE (au dernier état disponible de bassin) alors qu'elle est par ailleurs en mauvais état chimique en raison des HAP. Casser des moulins centenaires n'a aucun effet contre les pollutions diffuses. C'est l'accomplissement d'un programme dicté par l'idéologie, et non pas la résultante d'une approche raisonnée et concertée des enjeux écologiques réels du bassin.

20/10/2016

Brutal et minable: le syndicat de l'Armançon SMBVA essaie de détruire les barrages de nuit...

Seuil Saint-Nicolas, Tonnerre. Après avoir tenté de faire expulser les manifestants par les gendarmes, le Syndicat de l'Armançon SMBVA en est réduit à sortir la pelleteuse de nuit pour entamer la destruction du seuil Saint-Nicolas. Hydrauxois demandait à l'administration et au syndicat d'avoir la décence d'attendre l'avis du juge ; nous avons maintenant la réponse des partisans acharnés de la casse du patrimoine hydraulique français. Dont acte, mesdames et messieurs les casseurs, mais le spectacle de vos pratiques ne vous promet pas des lendemains qui chantent. A noter que, dans la plus grande confusion de ce chantier catastrophique, le propriétaire rive droite menace désormais de porter plainte si les machines du syndicat s'approchent de la partie du lit qu'il possède. Des militants campent sur la chaussée Saint-Nicolas cette nuit, et nous appelons tous les lecteurs de cet article à nous y rejoindre pour défendre la zone encore intacte. 


Les citoyens voulant empêcher le passage des engins sont refoulés par la gendarmerie. Qu'à cela ne tienne, on prépare les panneaux et direction la chaussée.


La chaussée Saint-Nicolas n'a pas encore tout à fait disparu, et ses défenseurs le font savoir. Qui eût dit, dans sa longue histoire, que des riverains grimperaient un jour sur son couronnement pour la défendre?


Au long de la rivière...


La pelleteuse entre en action sur la rive gauche et commence à casser la chambre d'eau, le radier et le magnifique système de vanne du moulin.


Après une pause, la pelleteuse profite du départ des manifestants pour sortir à la nuit tombante et commencer la casse! Mais l'un d'eux est encore dans les parages et retarde l'engin du mieux qu'il peut. D'autres le rejoignent pour bloquer la progression.


Retenez bien ces images, riverains du bassin de l'Armançon et autres cours d'eau de Bourgogne: c'est l'objectif affiché du syndicat de rivière, de la DDT, de l'Agence de l'eau Seine-Normandie et de l'Onema sur le maximum d'ouvrages hydrauliques, dont la disparition est programmée au nom de l'idéal de la rivière "renaturée". Et c'est votre argent qui paie ces démolitions. Si vous voulez conserver le patrimoine et le paysage de nos cours d'eau, si vous ne supportez plus ces pratiques d'apprentis-sorciers jouant avec le passé et l'avenir de nos vallées, il faut s'engager dès à présent pour bloquer les chantiers de Tonnerre et de Perrigny-sur-Armançon, mais aussi pour préparer la résistance sur tous les autres chantiers déjà programmés pour 2017. Restez connectés, la mobilisation ne fait que commencer!

Photographies : Alain Guillon et Gérald Charpentier