21/08/2015

Confiez votre ouvrage hydraulique au Sicec...

... et voilà ce qui arrivera. 19 août 2015, au petit matin : l'ouvrage Floriet a disparu de la Seine (Nod-sur-Seine, 21).


Ces travaux ont été menés en pleine alerte sécheresse sur le département, sous la direction du syndicat Sicec qui avait racheté le seuil en 2010 afin de mieux le détruire. Doivent encore disparaître sous les pelleteuses le moulin des Ecuyers à Châtillon, le moulin de la scierie de Cosne, le vannage du vieux moulin de Beaunotte sur la Coquille. On comprend sans difficulté qu'un nombre croissant d'élus locaux des bassins Seine et Ource s'inquiètent de cette politique destructive et ne souhaitent pas la voir appliquée sur les rives de leurs villages, dont le paysage est souvent dessiné par des ouvrages hydrauliques. Quant au bilan coût-bénéfice pour l'environnement de ces opérations financées sur argent public, il reste à établir. Nous y reviendrons prochainement à propos de l'effacement de la forge d'Essarois.

Edit, 27/08/2015 : suite à des échanges avec des lecteurs (voir commentaire), précisons que l'Onema a une station de mesure de qualité de la rivière à Nod-sur-Seine, notamment l'Indice poisson rivière (IPR) qui est l'indicateur piscicole retenu pour la directive européenne de qualité écologique des eaux (DCE 2000). L'IPR de 2013 signalait une qualité piscicole "bonne" de la Seine, avec score de 8,74. L'IPR de 2011 (rien en 2012) est "excellent" avec un score de 6,97. Il est donc important de comprendre que cette destruction sur argent public ne concernait pas une rivière présentant des problèmes graves pour le compartiment piscicole, puisque sur ce compartiment, la Seine à Nod est éligible au bon état écologique.

A lire sur le même sujet :
Désastre écologique à Vanvey
Rochefort-sur-Brevon se bat pour son patrimoine
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20/08/2015

Continuité écologique : les 4 erreurs de Ségolène Royal (ou de ceux qui répondent à sa place, et qui trompent Mme la Ministre…)

L'association des Amis des moulins de l'Ain a demandé à son député, Xavier Breton, de saisir Mme Royal d'une question écrite à propos des problèmes rencontrés par les propriétaires de moulins dans le cadre de la mise en oeuvre de la continuité écologique. Vous pouvez télécharger le document à cette adresse.

La réponse de Mme Royal – plus probablement de sa direction technique de l'eau et de la biodiversité au Ministère de l'Ecologie – illustre le déni persistant des problèmes par les services de l'Etat.


"La restauration de continuité écologique des cours d'eau est une politique importante pour l'atteinte du bon état des eaux préconisé par la Directive cadre européenne sur l'eau (DCE) de 2000"

C'est faux, c'est archi-faux et la répétition de ce mensonge en 2015 est pour le moins inquiétante sur la bonne foi du rédacteur de ce courrier. La DCE 2000 mentionne dans son Annexe V la "continuité de la rivière" parmi de nombreux autres facteurs d'appréciation de la qualité de l'eau courante, mais elle n'a jamais fait de l'hydromorphologie (en particulier du sous-compartiment de continuité longitudinale) une condition sine qua non du bon état écologique. Les études scientifiques les plus récentes montrent qu'il existe une faible corrélation entre les barrages en rivières et les indices de qualité biologique ou chimique de l'eau retenus par la DCE 2000, les opérations de restauration morphologique ne permettant presque jamais d'atteindre le bon état au sens de la DCE à partir d'une rivière dégradée. L'insistance sur la continuité écologique est un choix franco-français, ne répondant généralement pas à des urgences environnementales, ne correspondant à aucune obligation européenne réelle et pire encore, ne garantissant pas l'atteinte du "bon état" auquel nous sommes justement obligés vis-à-vis de l'Europe. Ce choix a été dicté à partir de 2004 par des lobbies en comité de bassin (FNE, FDPF) et par le poids interne de certains services au sein de l'appareil administratif (CSP devenu Onema, Dreal, personnels en charge des suivis techniques au sein de certaines Agences de l'eau, Direction de l'eau et de la biodiversité au Ministère). La continuité écologique a été ensuite sanctuarisée dans le cadre du Grenelle et de divers plans de gestion, parce que cela arrangeait certains lobbies de détourner l'attention sur des sujets mineurs pour la qualité de la rivière comme cela arrangeait certaines administrations de trouver un cache-sexe pour l'impuissance de l'action publique sur cette même qualité.

"Différentes solutions existent, allant de la suppression de l'ouvrage à l'ouverture régulière des vannes en passant par l'aménagement de passes à poissons, la réduction partielle de la hauteur de l'ouvrage ou l'implantation de brèches"

C'est exact, mais cela dissimule de manière malhonnête la réalité de terrain : les services instructeurs de l'Etat (DDT, Onema), les Agences de l'eau, les syndicats de rivière et de bassin versant font globalement pression pour favoriser la seule suppression des obstacles à l'écoulement. L'effacement total ou partiel des barrages est encouragé règlementairement (par le traitement facile et rapide de tout dossier d'instruction en ce sens), il est financé à 80% voire 100 %. Quand le propriétaire veut conserver son barrage, on le matraque par des études coûteuses et bavardes avec à la clé des travaux pharaoniques ne recevant que peu ou pas de subventions, mais énormément de contrôles réglementaires de qualité (dossiers longs, complexes, opaques). Il existe en France, dans l'appareil d'Etat, une idéologie de la destruction systématique du patrimoine hydraulique. Ce fait est connu de tous les acteurs de la question – de très hauts fonctionnaires de la Direction de l'eau n'ont-ils pas confessé, en marge de réunions passées, que "laisser un ou deux moulins par rivière, c'est très suffisant" (donc détruire les dizaines d'autres que comptent généralement les rivières, c'est très nécessaire !). Tant que cette idéologie de la destruction des seuils et barrages – idéologie minoritaire voire marginale dans la société, idéologie punitive et destructive, mais hélas idéologie dominante chez certains concepteurs de la partie réglementaire du droit de l'eau en France –, ne sera pas exposée et dénoncée comme telle, les conflits continueront.

"Sans nier les difficultés que rencontrent les propriétaires de moulins, il ne me semble pas souhaitable que celles-ci conduisent à remettre en question la position équilibrée qui a été adoptée dans cette loi [LEMA du 30/12/2006] sur une problématique qui concerne de nombreux acteurs".

Il est trompeur de suggérer ainsi que la LEMA 2006 pose problème en soi : les députés et sénateurs ont souhaité en tout et pour tout faciliter "la circulation des poissons migrateurs" (article L-214-17 C env) dans des rivières "classées" (sans précision sur l'ampleur et le calendrier du classement). Ce sont les services du Ministère et des Agences de l'eau qui, de manière fort peu démocratique (c'est-à-dire par voie réglementaire avec un minimum de contrôle et de concertation), ont transformé cet objectif légitime en une immense usine à gaz, ajoutant des espèces de poissons qui ne sont pas réellement des migrateurs (ie dont la migration n'est pas un élément essentiel du cycle de vie et de reproduction), exigeant pour de très modestes et très anciens seuils des aménagements exorbitants dignes des capacités financières des grands barragistes EDF ou VNF, classant des rivières entières en liste 2 sans aucun réalisme sur la capacité de mise en oeuvre de cette réforme dans le délai de 5 ans prévu par la loi, et sans aucune priorisation sur les enjeux environnementaux ou les parcours de montaison des (vrais et grands) migrateurs.


"Une première mission a été confiée au Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) concernant la réalisation d'un diagnostic de la mise en oeuvre concrète du plan d'action pour la restauration de la continuité écologique des cours d'eau, ainsi qu'une évaluation des sources de blocages et de tensions."

Et donc ? Mme la Ministre oublie de mentionner que ce rapport du CGEDD déplore l'absence de concertation dans la mise en oeuvre de la continuité, ce qui contredit l'idée émise plus haut selon laquelle le processus de décision aurait été "équilibré". L'absence de concertation a même été constatée par la plus haute instance de notre droit public, le Conseil constitutionnel, dans la QPC du 23 mai 2014. Une disposition législative relative à l'environnement a été reconnue comme non constitutionnelle car n'ayant pas sollicité la participation des citoyens lors de son élaboration, mais elle a été validée malgré tout par le Conseil… car il a été jugé qu'il serait trop compliqué de l'abroger! Ces épisodes (parmi d'autres) révèlent la dérive antidémocratique de la politique de l'eau, justifiant l'opposition totale des propriétaires, usagers et riverains ainsi que des élus locaux à une politique décidée sans eux, malgré eux, contre eux.

"Une deuxième mission a ensuite été confiée au CGEDD. Elle a pour objet d'organiser une table ronde nationale avec les représentants des propriétaires de moulins, de collectivités et d'associations de protection de la nature. (…) L'objectif est l'élaboration d'une charte sur les questions liées aux moulins et à la restauration de la continuité écologique".

Hydrauxois ne signera jamais une charte proposée par l'Etat français tant que celui-ci n'aura pas reconnu la pleine légitimité d'existence des moulins et de leurs ouvrages hydrauliques, et qu'il n'aura pas donné la liberté réelle (économique notamment) de choisir des solutions non destructives si ces ouvrages doivent être aménagés à fin de continuité écologique. Notre association appelle toutes ses consoeurs à défendre cette ligne, qui correspond à une base élémentaire de justice et de décence.

Car il est indécent de proposer une "charte" pendant que les services de l'Etat cassent des droits d'eau, que les préfets signent les arrêtés d'effacement, que les pelleteuses massacrent le patrimoine historique et le potentiel énergétique, que des décrets scélérats sont publiés pour décourager les propriétaires de restaurer leurs moulins. Il est indécent de laisser entendre que la concertation fonctionne correctement alors que les négociations autour de la charte sont au point mort, que partout en France, des élus et des riverains s'indignent de la défiguration de leur cadre de vie par les destructions de chaussées et de biefs, que la gabegie d'argent public frise l'obscénité dans une France en retard sur tous ses autres engagements sur l'eau (nitrates, eaux usées, etc.).

Plus que jamais, nous appelons donc ceux qui nous lisent :
- à signer et surtout à faire signer la demande de moratoire sur la continuité écologique, position unitaire nationale déjà soutenue par la FDMF, la FFAM, l'ARF et OCE, avec plusieurs autres partenaires en voie de nous rejoindre;
- à éviter tout engagement auprès d'un syndicat ou d'une administration risquant de mener à la destruction d'un ouvrage hydraulique;
- à refuser de mettre en oeuvre l'article 214-17 du C env en rivière classée L2 tant que l'Etat et les Agences de l'eau n'auront pas apporté toutes les garanties sur les bonnes conditions réglementaires, juridiques, environnementales et financières de cette mise en oeuvre.

19/08/2015

3e Rencontre de l’hydroélectricité en Bourgogne et en Franche-Comté

Les directions régionales de l’ADEME en Bourgogne et en Franche-Comté et la région Bourgogne organisent en partenariat avec l’Association Bourgogne Énergies Renouvelables la 3e rencontre de l’hydroélectricité en Bourgogne et en Franche-Comté, le 25 septembre 2015 à Cuisery en Saône-et-Loire.

Programme prévisionnel de la journée:
9h : Accueil
9h30 : Table Ronde « Construire son plan de financement »
11h : Témoignages
12h : Point d’actualité juridique
13h : Repas
14h30 : Visite du moulin de Cuisery
Forum avec des professionnels de l'hydroélectricité

Pour recevoir le programme complet de la journée ainsi que le bulletin d’inscription, merci de contacter l’association Bourgogne Énergies Renouvelables par :
• internet sur le site http://www.ber.asso.fr
• téléphone au 03.80.59.12.80
• courriel à hydro(at)ber.asso.fr

16/08/2015

Rochefort-sur-Brevon (21) se bat pour préserver son patrimoine hydraulique

Le Brevon est un petit affluent châtillonnais en rive droite de la Seine, long d'une trentaine de kilomètres. Il trouve sa source à Echalot et conflue à Aisey-sur-Seine. La rivière s'inscrit dans une superbe vallée qu'apprécient tous les amoureux de la nature, mais aussi du paysage et du patrimoine : son cours est jalonné de nombreux ouvrages hydrauliques formant des plans d'eau dans leurs retenues.

Le village de Rochefort-sur-Brevon, encaissé au pied d'un pittoresque éperon rocheux, saisit le visiteur par la beauté inactuelle de son bâti. On y trouve 3 sites classiques du patrimoine sidérurgique de la Bourgogne du Nord : la forge du Haut, au pied de la chaussée formant un étang, la forge du Bas avec sa cheminée d'affinerie caractéristique et, environ deux kilomètres à l'aval, la fenderie, elle aussi adossée à un seuil créant un étang.

Le site fait actuellement l'objet d'une étude par le bureau Artelia, commanditée par le syndicat de rivière Sicec. Enjeu : la continuité écologique. Le diagnostic dressé en 2011 par la FDAAPPMA 21 avait désigné cette succession de retenues comme un point noir (réchauffement de l'eau, rupture de continuité longitudinale). Dans ce cas de figure, les syndicats de rivière et les services instructeurs de l'Etat (DDT, Onema) tendent à favoriser les effacements totaux ou partiels des ouvrages hydrauliques et de leurs plans d'eau.

Les élus du village ont voté une délibération rappelant leur attachement profond à l'intégrité paysagère et architecturale du site. Ils rappellent que l'envasement de l'étang est dû à la dégradation assez récente du système de vannage. Les élus souhaitent que soit engagée la restauration la forge du Haut et que soit envisagée une production hydro-électrique locale.

Les associations Hydrauxois et Arpohc :
- rappellent que l'acharnement actuel à détruire la maximum d'ouvrages relève d'une écologie punitive sans proportion avec les enjeux environnementaux réels ;
- souhaitent que l'argent public soit dépensé avec discernement, tant pour restaurer la qualité des rivières que pour préserver le cadre de vie construit au fil des siècles par les riverains ;
- soutiennent pleinement le choix des élus et habitants de Rochefort-sur-Brevon en faveur de solutions non destructives ;
- se placent à leur disposition pour toute démarche qui serait jugée utile à la préservation du patrimoine hydraulique et à sa valorisation énergétique, ainsi qu'à l'amélioration environnementale par des mesures simples, proportionnées et de bon sens.

Illustrations : Christal de Saint-Marc (DR) ; Christian Jacquemin (Arpohc)

15/08/2015

Yonne à l'amont de Pannecière: un effacement de seuil pollue la rivière

Nous publions ci-dessous le communiqué intégral de l'AAPPMA La Truite morvandelle à propos de la pollution de la rivière Yonne survenue au début du mois d'août, dans le cadre des opération de préparation d'un effacement total de seuil à l'amont du barrage (infranchissable) de Pannecière. Cette dégradation du milieu aquatique rappelle que les destructions de seuils ne sont pas des opérations anodines quant à la remobilisation des sédiments.  


Inquiétude du monde de la pêche au sujet de l’Yonne à l’aval du réservoir de Pierre Glissotte. Les opérations de vidange en vue de l’effacement total de cet ouvrage, qui posait problème à la continuité écologique sur cette portion de rivière, se sont effectuées dans la dernière quinzaine de juillet. 

L’AAPPMA La Truite Morvandelle avait été sollicitée pour prêter main forte au sauvetage des poissons présents dans la retenue ; ceux-ci n’étaient pas très nombreux, quelques truites, vairons, goujons et autres lamproies de planer ont été remis dans l’Yonne à l’amont, tandis que les quelques carpes , tanches et chevesnes ont été transférés  en 2° catégorie, les écrevisses signal ont bien entendu été détruites.

Ces opérations ce sont bien déroulées jusqu’à ce qu’un petit orage vienne grossir un des ruisseaux affluent qui descend de Château-Chinon, ce qui a eu pour effet d’obstruer  les grilles du barrage.

Lors de l’opération de dégrillage pour permettre l’écoulement de l’eau, des parties de la digue ont cédé, ce qui a eu pour effet l’évacuation de boues vers l’aval. Boues qui auraient dû être évacuées ou stabilisées dans un schéma de vidange normal et n’auraient pas du se retrouver dans la rivière. 


Depuis,  l’eau de l’Yonne qui  s’écoule est de couleur gris noir et le fond est recouvert de sédiments boueux et ce jusqu’à l’entrée dans le lac de Pannecière. Il n’aurait pas été constaté de mortalité de poissons… mais on peut supposer que la micro faune qui vit, dans et sur le substrat est fortement impactée, et ce sur plusieurs années.

La Fédération de Pêche de la Nièvre, l’AAPPMA La Truite Morvandelle et la Sté de pêche de Corancy ont fait part de leur inquiétude auprès de l’ Office National de l’Eau et Milieux Aquatiques ainsi que de la Direction des Territoires qui suivent le dossier.

Illustration : © JB Dioux, source Esoxiste