02/09/2015

La vallée du Brevon, patrimoine et paysage menacés

Ci-dessous, quelques visages de la vallée du Brevon, où l'on reconnaît les zones humides à l'amont de la pisciculture de la Chouette (en partie créées par ses seuils de retenue), les ouvrages métallurgiques et hydrauliques de Rochefort (fenderie, forge du bas, étang du haut), la maison de Broissia (style industriel du XIXe siècle, à l'endroit d'un ancien château du XIIe siècle). Un patrimoine et un paysage superbes en tête du bassin de la Seine, aujourd'hui menacés par les réformes de continuité écologique. Le prétexte est que ces cours aménagés par l'homme ne présenteraient pas la "bonne" biodiversité, celle que réclament des "biotypologies" calculant par A+B quels quotas exacts de poisson on attend sur chaque mètre carré de linéaire de rivière… Cette comptabilité amnésique et mécanique devient quelque peu obsessionnelle chez certains et conduit à exiger la "renaturation" du plus modeste cours d'eau, au détriment de son histoire, de son paysage et de l'avis de ses habitants, qui ne sont jamais ouvertement et collectivement consultés pour exprimer leurs souhaits. Si ces diktats vous insupportent, exigez qu'ils cessent !

Edit : suite aux échanges avec lecteurs (cf ci-dessous commentaires), rappelons que le Brevon a fait l'objet d'une étude par le Sicec et la FAAPPMA 21 en 2011, visant à définir ce qui est considéré comme un "état zéro" du milieu. Deux points de mesure ont été définis (amont de Beaulieu, amont de Rochefort). Au plan piscicole, le Brevon a un peuplement de truite, chabot, vairon, loche franche, lamproie de Planer, goujon, gardon. Si les abondances sont moindres que celles attendues pour certaines de ces espèces, l'état écologique de la rivière (IPR) est "bon" sur le compartiment piscicole. L'indice IBGN (invertébrés) est "bon" à "très bon" sur le même secteur en 2009 et 20111 (évolution positive depuis 2007). Le Brevon est donc conforme à l'état écologique attendu au regard de la Directive-cadre européenne sur l'eau. Seul l'extrémisme de quelques-uns pourrait engager dans ces conditions une altération du patrimoine hydraulique pour des motifs soi-disant "écologiques". Des aménagements doux, non destructifs et proportionnés à l'enjeu (faible) sont à privilégier. D'autant que les retenues d'eau de la vallée représentent moins de 7% du linéaire total de la rivière, et un taux encore plus faible si l'on tient compte des ruisseaux affluents.








01/09/2015

Continuité écologique : une question à Mme Royal qui résume bien les problèmes

La campagne pour le moratoire sur la continuité écologique ne fait que commencer, mais ses effets se font déjà sentir et les retours que nous recevons témoignent d'une immense indignation partagée par les associations de terrain et les élus locaux. Au Sénat cet été, M. Jean Claude Lenoir (Président de la Commission des affaires économiques) a interpellé Ségolène Royal sur ce thème (texte ci-dessous). Nous sommes heureux de constater que l'élu fait sien un certain nombre d'arguments développés sur ce site, et sur d'autres. Nous ne manquerons pas d'analyser en détail la réponse de Mme la Ministre, comme nous l'avons fait ici. D'autres élus, députés ou sénateurs, se sont d'ores et déjà engagés à interpeller le Ministère sur cette question de la continuité écologique, devenue le symbole des dérives de la politique de l'eau : autoritarisme réglementaire et absence de concertation, irréalisme économique et gabegie d'argent public, absence de suivi scientifique sérieux et manquement manifeste à l'obligation européenne de résultats, fossé grandissant entre les riverains, les services instructeurs de l'Etat et des Agences de l'eau, les syndicats de rivière.

Question de Jean-Claude LENOIR n° 17434
M. Jean-Claude Lenoir attire l'attention de Mme la Ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les critiques de plus en plus nombreuses qui s'élèvent, suite à la révision du classement des cours d'eau, concernant les modalités de mise en œuvre du principe de continuité écologique pour les cours d'eau classés en liste 2. Selon ce classement, 10 à 20 000 ouvrages seraient ainsi menacés soit de destruction, soit d'obligation d'équipement par des dispositifs de franchissement souvent fort coûteux. 
La mise en œuvre de ces préconisations aurait des impacts considérables : coût très élevé pour les propriétaires et pour les finances publiques dans le contexte actuel de restriction budgétaire, affaiblissement du potentiel hydroélectrique allant à l'encontre de l'objectif de transition énergétique, destruction d'un patrimoine hydraulique ancestral qui constitue souvent un atout pour l'attractivité touristique des territoires ruraux. 
De surcroît, ces préconisations sont jugées disproportionnées par beaucoup au regard du résultat attendu en termes d'amélioration de la qualité des eaux. Compte tenu des doutes qui existent aujourd'hui concernant la faible corrélation entre la présence de seuils en rivières et les impacts biologiques ou écologiques au sens de la directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, il apparaît en effet que la mise en œuvre de telles préconisations n'apporterait aucune garantie de résultat quant au respect de nos obligations européennes en la matière. Il lui rappelle que la continuité écologique est loin d'être le seul paramètre à prendre en compte pour assurer le bon état écologique et chimique des eaux, la réduction des pollutions de toutes natures étant un paramètre déterminant à cet égard. 
Sans remettre en cause le principe de continuité écologique, il semble donc indispensable d'en analyser l'efficacité réelle sur la qualité des milieux aquatiques. Il souhaiterait connaître sa position sur ce sujet et les initiatives que le Gouvernement compte prendre pour définir les conditions d'une mise en oeuvre de la continuité écologique équilibrée, qui soit financièrement soutenable pour les maîtres d'ouvrage et garante d'une gestion efficiente des finances publiques.

31/08/2015

Pour quelques (petits) poissons rhéophiles de plus (Schmutz et al. 2015)

Stefan Schmutz et ses collègues (Université des sciences de la vie et des ressources naturelles, Vienne), en collaboration avec des confrères tchèques, allemands et suisses, ont analysé la réponse des populations de poissons à des opérations de restauration hydromorphologique. Ces travaux pouvaient concerner des reméandrements, des reconnexions, des élargissements de lit ou des petites modifications des écoulements (pas de suppression d'obstacles). Pour mener à bien cette analyse, 15 paires de rivières similaires, mais tantôt aménagées tantôt non aménagées, ont été comparées en Europe centrale et septentrionale. Les auteurs ont évalué le délai de réponse (entre 1 et 17 ans après la restauration), le niveau de qualité morphologique après travaux, la longueur du linéaire concerné. Sur les paramètres biologiques, ils ont mesuré la diversité de Shannon, la richesse spécifique, la richesse / densité de espèces rhéophiles (aimant le courant vif) et eurytopes (tolérantes à des conditions très différentes). Au sein des rhéophiles, ils ont distingué la taille des espèces concernées.


Principaux résultats (voir aussi image ci-dessus, cliquer pour agrandir) : 43 espèces ont été recensées (20 rhéophiles, 15 eurytopes, 8 limnophiles) auxquelles s'ajoutent 3 espèces exotiques. Onze paires de rivières sur quinze ont conservé le même type de communautés de poissons, une est passée de salmonidés à non-salmonidés, trois ont évolué en sens opposé.

La restauration morphologique a eu des effets significatifs pour 5 métriques (sur 13). La richesse spécifique ne s'est en moyenne améliorée que d'une espèce. La densité des seuls rhéophiles de petite taille (+ 24%) est significative après test du seuil de significativité (correction de Bonferroni). La diversité de Shannon-Wiener est sans changement notable, tout comme la densité totale. Sur la métrique ayant l'évolution la plus significative (densité du petits rhéophiles donc), aucune différence n'est trouvée selon l'importance du chantier de restauration. Un effet positif est trouvé pour des longueurs restaurées supérieures à 1,95 km (mais la variation est observée à partir de 3 sites sur 15 essentiellement). En terme de délai de réponse, les changements les plus importants sont notés avant 3 ans et après 12 ans et demi.

Les auteurs, après avoir rappelé la difficulté de cerner les effets exacts des restaurations écologiques de rivière, concluent notamment : "Notre étude démontre que le poisson répond de manière cohérente à des mesures de restauration hydromorphologique par une augmentation des rhéophiles et un déclin des eurytopes. Il semble y avoir une réponse non-linéaire à l'âge de la restauration, avec des effets positifs à court et long termes, mais moins prononcés à moyen terme. L'effet de la restauration augmente avec la qualité de l'habitat et la longueur du linéaire restauré. Cependant, la pratique et la technique actuelle de restauration ne permet pas une récupération complète des espèces perdues ou des densités de populations." Ils émettent ensuite diverses hypothèses à vérifier par un suivi scientifique plus rigoureux et plus large des restaurations de rivières.

Commentaires : quels coûts socio-économiques pour quels bénéfices environnementaux? 
Les résultats de S. Schmutz et al. sont assez représentatifs de ce que l'on trouve dans la littérature spécialisée en analyse de la restauration de rivière. Les assemblages de poissons sont modifiés, dans un sens généralement prévisible (on favorise des écoulements lotiques à habitats variés, on trouve davantage de rhéophiles inféodés à ce type d'habitats). Mais l'évolution est globalement modeste, même après un long délai.

Cela pose évidemment la question de la légitimité sociale des approches de la rivière. Un certains nombre d'experts, chercheurs, ingénieurs, techniciens et gestionnaires estiment tout à fait satisfaisants ce type de résultats. Il en va de même pour des usagers de tel syndicat de pêche ou des militants de telle association. Il reste que les opérations de restauration ont un coût important (nous en développerons un exemple prochainement) et que la conclusion souvent tirée de ce type de recherche ("aménageons de manière toujours plus ambitieuse des linéaires toujours plus longs") promet de faire exploser ces coûts. Or, quand on explique aux citoyens ce qui se cache derrière des termes savants et compliqués – et parfois volontairement compliqués pour étouffer le débat sous la parole dominante de quelques "sachants" –, le consensus est rarement au rendez-vous. Car on comprend que l'argent public ne sert pas à "sauver la rivière", comme certains sauveurs autoproclamés le revendiquent de manière fort excessive, mais d'abord à augmenter la densité locale de quelques espèces de poissons, dont beaucoup sinon toutes ne sont menacées ni sur la rivière, ni sur le bassin, ni sur leur aire de répartition européenne.

Qu'est-on prêt à sacrifier au juste pour de tels résultats? A budget limité (par définition), les autres dépenses de qualité de l'eau sont-elles prioritaires ou non par rapport à celles-là? Ces questions sont légitimes ; refuser ou éviter de les poser ne l'est pas.

Référence : Schmutz S et al (2015), Response of fish assemblages to hydromorphological restoration in central and northern European rivers, Hydrobiologia, e-pub, doi 10.1007/s10750-015-2354-6

Illustrations : extraites de l'article, tous droits réservés.

28/08/2015

Une thèse sur les incertitudes liées aux indicateurs biologiques de qualité de l'eau

La Directive cadre européenne sur l'eau 2000 (DCE 2000) engage les Etats-membres à réaliser une estimation de l'état écologique et chimique des cours d'eau, en vue d'atteindre une bonne qualité des eaux de surface (comme des eaux souterraines et estuariennes). Pour l'état écologique, on a recours à des indicateurs biologiques qui répondent aux pollutions chimiques ou aux modifications hydromorphologiques en même temps qu'ils mesurent la biodiversité. La démarche n'est pas nouvelle : plusieurs biotypologies ont été développées au XXe siècle, en particulier après les grandes pollutions commencées dans les années 1960. Mais la DCE 2000 a systématisé la pratique. Juliane Wiederkehr a soutenu une intéressante thèse doctorale consacrée à l'estimation des incertitudes associées aux indices macroinvertébrés et macrophytes pour cette évaluation de l'état écologique des cours d'eau.

Comme l'observe J. Wiederkehr, "en hydrobiologie, il est acquis que de nombreuses incertitudes existent dans les protocoles d’évaluation des milieux aquatiques. En effet, la communauté scientifique connaît la complexité des écosystèmes, d’autant plus lorsque s’y ajoutent les activités humaines. Cette complexité apporte une variabilité importante, difficilement appréciable, qui ne peut être approximée que par le biais d’expérimentations ou de modèles. De plus, la plupart des mesures effectuées en hydrobiologie repose sur des protocoles s’appuyant sur les connaissances et l’expérience des hydrobiologistes. Ceux-ci s’appropriant les normes, leur subjectivité se retrouve au cœur des évaluations. Ainsi, les incertitudes associées à l’évaluation de la qualité des cours d’eau, au travers des indices biologiques, forment une thématique d’actualité majeure, en particulier pour les différents compartiments biologiques (oligochètes, diatomées, poissons, invertébrés et macrophytes)."

Les sources d'incertitude sont donc nombreuses : mosaïque d'habitats sur un même site offrant des lieux hétérogènes de prélèvement et récolte, fluctuation naturelle (spatiale et temporelle) des populations sur les substrats ou selon les méso-habitats, définition de la surface ou volume correct des collectes, choix de la méthode technique d'échantillonnage (agitation, peignage), effet opérateur (erreurs d’extraction et d’identification), sous-traitement quantitatif de l'échantillon, difficulté de prise en compte des taxons rares…

Des erreurs pouvant représenter 20 voire 25% du score total
On constate (non sans une certaine inquiétude) à la lecture de ce travail que l'accumulation de ces erreurs peut entraîner une variation de l’IBG (Indice biologique global) DCE jusqu'à 5 points d’écart, soit 25% de la note, et une variation de l’I2M2 (Indice invertébrés multimétriques) de 0,2, soit 20% de la note. Ce sont certes des valeurs maximales, mais elle peuvent très bien conduire à un déclassement ou surclassement erroné du cours d'eau analysé (dont la note détermine en général 4 ou 5 classes de qualité). Les gestionnaires en charge de la DCE sont d'ailleurs conscients du problème, puisqu'ils demandent des estimations d'incertitude, ce sur quoi ont travaillé divers projets européens depuis les années 2000 (AQEM, STAR, WISER). Une meilleure communication sur ces incertitudes serait bienvenue dans le discours des "sachants" lorsque les indicateurs viennent à se matérialiser dans des analyses et des décisions de terrain.

Outre l'intérêt de comprendre les principes et quelques éléments d'histoire de la bio-indication, exposés de manière claire, cette thèse montre de notre point de vue le caractère "work in progress" des constructions de connaissances en hydrobiologie / hydroécologie, avec au sein de la communauté savante beaucoup de débats, à différents niveaux (de la perfectibilité des méthodes à la discussion sur les trajectoires d'équilibre des écosystèmes ou les priorisations en stratégie de conservation / restauration). L'impact réglementaire à effet immédiat de la DCE 2000 et de ses déclinaisons nationales ne cesse donc de surprendre. On a l"impression assez nette que les décisions ont été prises avant de déployer les outils censés les fonder et valider, cela sur un calendrier manquant de réalisme (15 à 30 ans pour rétablir les écosystèmes dans leur état de référence présumé). Le gestionnaire de l'eau se réclame de l'écologie, mais sans forcément prendre la mesure de la complexité du vivant et des systèmes devant répondre à ses normes et ses évaluations.

Référence : Wiederkehr J (2015), Estimation des incertitudes associées aux indices macroinvertébrés et macrophytes pour l’évaluation de l'état écologique des cours d'eau, thèse, U Strasbourg, École doctorale des Sciences de la terre et environnement, 212 p.

Image : collecte de macro-invertébrés, Photo © Eawag, Elvira Mächler, tous droits réservés.

26/08/2015

Les barrages des moulins ont-ils autant d'effets sur la rivière que ceux des... castors? (Hart et al 2002)

La question de l'effet des effacements de barrages et de la nécessité d'en prioriser les opérations a été posée aux Etats-Unis plus tôt qu'en Europe, en raison des évolutions législatives datant des années 1970 (Clean Water Act, Endangered Species Act) et des premières mesures de "renaturation" sur le continent nord-américain.

David D Hart et ses sept collègues (principalement écologues et hydrobiologistes) ont publié en 2002 un article de réflexion sur le sujet. Ils observent : "la réponse attendue à l'effacement est souvent fondée sur la connaissance des grands barrages (eg > 15 m de hauteur) d'hydro-électricité ou de contrôle des crues, qui peuvent altérer considérablement la qualité de l'eau et le régime du débit, alors que la plupart des barrages supprimés sont des structures relativement petites (moins de 5 m) qui peuvent avoir moins d'effet sur les écosystèmes de la rivière. Il existe peu d'information sur les impacts écologiques de ces petits barrages, cependant, et des études en nombre limité ont amené des résultats variables".

Voulant illustrer leur propos, les chercheurs comparent les effets des barrières naturelles (chutes, obstacles créés par des embâcles, barrages de castor) avec ceux des petites barrages de moulin ou d'irrigation (1-5 m) et ceux des grands barrages (> 15 m). Voir la figure ci-dessous.


Il en résulte qu'à leur yeux, l'impact des petits barrages sur les débits, la température de l'eau, le transport des sédiments, la biogéochimie, la migration biologique et l'habitat est comparable à celui des barrages de castor ! Même s'il ne faut pas négliger le rôle paysager et morphologique de cet infatigable rongeur semi-aquatique, on connaît pire en terme de dénaturation des rivières.

Evidemment, tel n'est pas l'avis de nos gestionnaires français de rivières, qui prennent une mine catastrophée en voyant quelques sédiments dans une retenue de moulin et décrète qu'il s'agit là d'une intolérable atteinte à l'intégrité de la rivière… Que diront-ils quand les castors (espèce protégée dont on encourage l'expansion) prendront la place des moulins? Plus sérieusement, comme nous l'avons déploré auprès de nos interlocuteurs Dreal et Onema, il n'existe aujourd'hui aucun indice intégré qui permettrait de déterminer l'impact de chaque ouvrage (selon la hauteur, la superficie du remous, la distance à la source et la zonation, le temps de séjour de l'eau, etc.) et d'aménager en priorité ceux qui représentent des altérations importantes. La conséquence : on efface à tort et à travers, souvent des très petits ouvrages, en ciblant surtout des objectifs halieutiques, et en profitant d'opportunités politiques ou économiques plutôt qu'en visant des effets environnementaux cohérents. On "restaure de l'habitat" en présupposant qu'un certain linéaire d'habitat restauré représente toujours un gain significatif pour la rivière et son écosystème. Ce qui n'est probablement pas le cas.

Référence : Hart DD et al (2002), Dam removal: challenges and opportunities for ecological research and river restoration, BioScience, 52, 8, 669-682.