Précision liminaire : nous avons demandé aux services de l'UICN et du MNHN l'accès à des données de synthèse par espèces et bassins, mais celles-ci ne sont pas disponibles. Nous le regrettons, il est souhaitable que de telles données d'écologie soient plus facilement accessibles et consultables par les citoyens.
Le tableau ci-dessous montre les espèces considérées comme les plus vulnérables (catégorie VU vulnérable, EN en danger, CR en danger critique). On observe que les tendances sont stables ou à la baisse, notamment pour les poissons migrateurs.
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Au cours des quinze dernières années, les agences de l'eau ont dépensé de l'ordre de 2 milliards € par an. Environ 10 à 20% de ces dépenses (selon les bassins et les années) sont dédiées à la morphologie des cours d'eau et bassin, notamment la restauration d'habitats. L'insistance sur la morphologie s'est développée à partir du début des années 2000, après adoption de la directive cadre européenne sur l'eau. Le Plan d'action pour la restauration de continuité écologique (PARCE 2009) et le classement des rivières au titre de la continuité écologique (2011-2012) ont notamment entraîné une redirection importante des moyens financiers vers la question de la continuité en long, avec de nombreuses destructions d'ouvrages ou constructions de dispositif de franchissement.
L'hypothèse selon laquelle une perte d'habitats est la meilleure explication de déclin d'une espèce doit conduire à observer la hausse de la population de cette espèce quand l'habitat est restauré ou rendu accessible.
Pour l'instant, l'effort réalisé par les agences de l'eau sur le volet morphologique et notamment la continuité en long ne se traduit pas par de tels résultats, alors que le temps de génération des poissons (annuel ou quelques années pour les migrateurs) aurait pu permettre des évolutions déjà observables sur deux décennies de restauration physique. Plusieurs hypothèses :
- les données IUCN et MNHN ne sont pas complètes,
- les choix des agences de l'eau ne sont pas efficaces,
- le temps de réponse des populations est long,
- la restauration / dépollution locale est sans effet majeur tant que le bassin reste dégradé de la source à l'estuaire.
Parmi les facteurs autres que la morphologie / l'habitat pouvant expliquer les variations de poissons, on connaît notamment :
- les pollutions eaux et sédiments, dont eutrophisation,
- les toxiques (repro-, géno-, neuro-) affectant les organismes,
- l'excès de prélèvement de l'eau,
- la surpêche et le braconnage,
- le changement climatique (températures extrêmes, assecs, crues),
- le cycle océanique des espèces migratrices (en partie lié au climat),
- l'apparition d'espèces invasives et/ou concurrentes,
- le développement d'espèces protégées mais prédatrices (loutre, cormoran etc.),
- les variations stochastiques (aléatoires).
Aussi devrait-on se garder – comme le font parfois l'IUCN, MHNN et l'AFB dans leur communiqué – d'avancer telle ou telle causalité. En particulier, alors que l'on dépense des centaines de millions € par an pour détruire des ouvrages, construire des passes à poissons, récréer des habitats et frayères sans résultat significatif observable (du point de vue des mesures de la Liste rouge), une certaine prudence s'impose sur des assertions trop généralistes.
Source : UICN-MHN-AFB (2019), La Liste rouge des espèces menacées en France. Poissons d’eau douce de France métropolitaine (pdf)
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